Pourquoi et
comment, à la fin du Moyen âge, le mouvement
de reconnaissance à travers le monde s'est
rapidement accéléré.
Différents facteurs doivent être pris en
considération. On trouvera une chronologie
détaillée en bas de page
Les causes
économiques.
À
la fin du Moyen-âge, une bourgeoisie riche, qui
pratique déjà le commerce international,
(Venise, Gênes, Lyon, Augsbourg, Munich, Bruges,
) s'est développée, à
côté des vieilles structures
féodales. Ses banques aident les rois. Elle
recherche à élargir ses marchés,
à en pressentir de nouveaux, si lointains
soient-ils. Elle cherche également de nouveaux
produits, des produits rares, précieux et de gros
rapport. La prise de Constantinople par les Turcs, en
1453, n'a pas coupé la route des épices par
le Moyen-Orient. La route génoise de la mer Noire
et la route vénitienne d'Adalia sont
interceptées, mais le trafic n'en est que plus
actif à Constantinople et, après 1516,
à Alexandrie, au-delà de laquelle la "paix"
turque rassure et contrôle les caravanes. Le besoin
de contourner la puissance ottomane qui détient le
monopole du commerce vers les Indes et de contrer le
monopole de Venise et de Gênes, amène le
Portugal et l'Espagne à chercher un
itinéraire concurrent, moins cher, au travers la
découverte de nouvelles routes maritimes. Deux
possibilités s'offraient: contourner l'Afrique ou
faire route à l'Ouest en supposant que la Terre
fût ronde. Les Portugais, sous l'impulsion d'Henri
le Navigateur, s'engagèrent sur la 1ère
voie, par le sud de l'Afrique. Les Espagnols
s'élançaient vers l'Ouest.
Les
bourgeois sont heureux d'investir leurs capitaux dans
l'armement, les constructions navales et les
expéditions maritimes. La fin de la guerre de Cent
Ans libère les énergies françaises
et anglaises. Mais il existe un obstacle qu'il faut
vaincre: le manque de numéraire, d'autant plus
grave que le crédit (billet de banque ou
chèque) n'existe pas; la lettre de change n'est
pas encore répandue et les prix ont tendance
à baisser et, par suite, à freiner la
production et les échanges. Se développe
alors le "prêt à la grosse aventure",
accordé à des marins qui s'embarquaient
pour des mois ou des années vers des
contrées lointaines, à charge d'en
rapporter de fabuleuses richesses destinées
à rétribuer les prêteurs. Chercher
les métaux précieux sous les climats
chauds, voilà un stimulant important pour la
découverte.
Enfin,
dans la péninsule Ibérique, aussi bien en
Espagne qu'au Portugal, les bourgeoisies sont moins
puissantes que les noblesses terriennes. Mais les cadets
des grandes familles ne savent que faire. Avides et
appauvris, ils cherchent de quoi se tailler de nouvelles
seigneuries: pourquoi pas dans les terres lointaines,
où elles deviendront peut-être des
empires?
Les causes
religieuses.
Non
seulement, on soupçonne l'existence de populations
lointaines et l'on éprouve un désir
d'évangélisation universelle, mais encore
on n'abandonne pas l'idée de croisade
défensive contre l'Islam menaçant. Les
Portugais et les Espagnols rejettent les Maures en
Afrique et même établissent des garnisons
sur cette terre d'Afrique pour la surveiller et se
protéger de nouvelles invasions. Depuis le
XIIIème s., on sait qu'il existe, au-delà
de l'empire des Turcs, un grand royaume fort et riche,
dont le prince est un chrétien : le Prêtre
Jean, négus d'Éthiopie. Son empire
s'étend peut-être jusqu'à la
côte ouest de l'Afrique : sans doute est-il
possible de l'atteindre par l'Atlantique et prendre
à revers et écraser les Turcs.
La
révolution géographique.
Les
gens du Moyen-âge se représentaient la Terre
comme un disque entouré par l'océan, qui
s'étendrait jusqu'aux murs soutenant le ciel.
Certains pensaient que si l'océan, au nord, se
changeait en glace, il devenait bouillonnant au sud, sous
l'effet des chaleurs. Or ces idées vont se
modifier grâce aux Arabes, qui transmettent les
travaux des géographes de l'Antiquité
hellénistique (idée de la rotondité
de la terre reprise de Ptolémée,
).
De plus, les récits de Marco-Polo
révèlent l'existence du Japon et de la
Chine. Ils en viennent à l'idée que
l'Afrique et l'Asie sont entourées par un
même océan, qu'on peut naviguer
jusqu'à cette Chine, qu'il est possible de
l'atteindre par l'Ouest.
La
révolution technique et
scientifique.
À
cette révolution géographique correspond,
dans l'art de la navigation, un gros progrès,
dû à 2 princes portugais: Henri le
Navigateur (1394-1460) et Jean II (1455-1495). Le premier
rassemble à Sagres, près du cap St Vincent,
un groupe de savants qui, grâce aux progrès
de la géographie, réunissent la
première collection cartographique. La boussole,
connue en Méditerranée depuis le
début du XIVème s., ne permet que la
"navigation à l'estime": on "estime" la position
du navire. Sous Jean II, on découvre le moyen de
calculer la latitude d'un lieu quelconque grâce
à l'astrolabe, qui sert à mesurer l'angle
de l'étoile Polaire, puis du Soleil avec
l'horizon. Dès lors, on n'hésite plus
à s'éloigner des côtes. L'astrolabe
se perfectionne. Il est souvent remplacé par le
quadrant, quart d'astrolabe muni d'un fil à plomb.
La position du fil à plomb sur l'arc gradué
indique la hauteur de l'astre au-dessus de
l'horizon.
À
côté de ces instruments fondés sur la
graduation du cercle, les marins portugais en utilisent
d'autres reposant sur les rapports entre les angles et
les longueurs. Le "bâton de Jacob", est
formé d'un segment glissant sur une tige: le
rapport entre la hauteur du segment et la hauteur de la
tige donne la hauteur de l'astre. Les tablettes de l'Inde
ont été utilisées par les Portugais.
Au centre d'une tablette est fixée une cordelette
où les distances sont marquées par des
nuds. Pour connaître la latitude, la hauteur
de l'astre au-dessus de l'horizon ne suffit pas. Il faut
tenir compte de sa déclinaison. Celle du soleil
varie avec chaque jour de chaque année. Depuis
Jean II, les Portugais possèdent des tables de
déclinaison, incluses dans les
"règlements", de la hauteur du pôle par le
soleil, c'est-à-dire les instructions que devaient
suivre les marins pour calculer cette
déclinaison.
Le
calcul de la longitude ne sera pas possible avant le
XVIIIème s., faute d'appareils précis de
mesure du temps. L'utilisation de la différence
des heures, appréciable par le sablier ou
l'horloge à eau, est connue à partir de
1524, mais impraticable à cause de
l'imprécision de ces instruments. Les
procédés astronomiques utilisant les
conjonctions et distances lunaires et les éclipses
étaient inutilisables à bord d'un
navire.
Les
cartes marines sont devenues plus exactes, plus
précises et plus complètes, mais elles
restent longtemps faites pour la navigation à
l'estime et à la boussole et ne tiennent pas
compte de la déclinaison magnétique. Elles
varient donc avec le temps. On a voulu parfois plaquer
sur elles un quadrillage (méridiens et
parallèles), mais celui-ci est purement artificiel
et ces cartes étaient très difficiles
à utiliser pour la navigation astronomique. On les
complétait par des "arts de naviguer", des
"journaux de bord" et des "routiers".
La
mutation de l'art nautique au début du
XVIème s. doit toutefois plus à
l'organisation et à la formation des hommes qu'aux
progrès dont les bases techniques étaient
connues à la fin du Moyen-âge, il convenait
de les adapter aux marins. Henri le Navigateur avait
donné l'impulsion en fondant "l'école" de
Sagres, l'Espagne ensuite avec le "collège" de
Séville, où Amerigo Vespucci, forma des
pilotes de renom. Le savoir des pilotes reposait plus,
sur leur expérience pratique que sur leurs
connaissances théoriques, une on navigue à
l'estime, contrôlée par une mesure
astronomique de latitude. Cette navigation à
l'estime, allait bénéficier d'un apport
fondamental attribué à Colomb: la
découverte de la déclinaison
magnétique et de ses variations. Encore fallait-il
que le vent, ne fît pas défaut et que les
navigateurs en connussent bien le régime. À
cet égard, l'invention décisive fut la
"volta" qui permit aux Portugais de progresser le long
des côtes d'Afrique et surtout d'en revenir; elle
consistait à concilier judicieusement le
régime des alizés et des
contre-alizés avec les impératifs d'une
navigation selon les parallèles.
Les
constructions navales font aussi, au XVème s., un
progrès décisif. Jusque-là on
n'utilisait que la galère (légère,
effilée et rapide, mais trop basse sur l'eau pour
affronter les vagues de l'océan) ou la nef (trop
lourde et trop lente, à un seul mât et une
seule voile). Née sur les côtes
ibériques, la caravelle sera l'outil des grands
voyages qui s'annoncent: voilier long, de haut bord comme
la nef aux lignes affinées, de dimensions moyennes
(la "Santa Maria" de Colomb mesurait 39 m de long et 8 m
de large), elle était rapide et
légère (100 tx). Grâce à ses 3
mâts: grand mât, artimon, trinquet, elle
pouvait porter une voilure importante; voiles
carrées aux mâts de l'avant, voile latine
à l'artimon et petite voile carrée sous le
beaupré lui conféraient l'avantage de tenir
l'allure de près et d'être très
maniable, lui permettent d'atteindre la vitesse de 6
nuds. Mais la caravelle, outil perfectionné
et coûteux, taillée pour la vitesse et les
routes proches du vent, ne pouvait guère assurer
les fonctions de transport et de combat; celles-ci furent
confiées aux caraques et galions qui
constituèrent, jusqu'au XVIIème s.
l'essentiel des flottes. Navires très lourds
(jusqu'à 2000 tx), de formes massives (15 m de
large pour 50 m de long), ils n'avaient aucune aptitude
à dépasser vent de travers et, bien qu'ils
fussent gréés d'une importante voilure
étagée sur de multiples mâts, leurs
châteaux munis de pièces d'artillerie
diminuaient leur
maniabilité.
Les causes
politiques.
La fin
de la guerre de Cent Ans a permis aux Français de
s'intéresser aux découvertes. L'Espagne et
le Portugal se sont tournés vers les grandes
aventures maritimes, une fois la "Reconquista" presque
terminée. C'est la naissance d'un empire
hispano-portugais en Europe, préparant celui qui
va se créer hors d'Europe. L'Angleterre a compris
que son destin était maritime lorsqu'elle a vu la
France l'évincer définitivement du
continent. Enfin la lutte contre les Turcs ou les Arabes
n'a pas un caractère purement religieux: il s'agit
de se défendre contre des puissances qui menacent
de faire la loi en Méditerranée et en
Europe orientale.
Ces
changements se produisent vers 1400 et surtout
après 1450. Les Portugais, les premiers à
avoir "reconquis" leur territoire national, les plus
proches aussi de l'Océan, de l'Afrique et de
l"Asie", sont aussi les premiers à se lancer dans
l'aventure.
Chronologie
des "grandes découvertes"
Les
Portugais atteignent, en 1416, le Cap Bojador.
L'époque dite des "grandes découvertes"
commence;
ils
atteignent les Îles du Cap-Vert en 1445;
franchissent l'Équateur en 1471.
Diogo-Cão
atteint l'embouchure du Congo en 1482, 600 km plus
loin, au sud de
l'Équateur.
Vers
1487, Barthélemy Dias double le Cap des
Tempêtes, celui que Jean II rebaptisera le cap de
Bonne-Espérance.
En
1489, les officiers portugais, Pêro da
Covilhã et Alphonse de Paiva, sont chargés
de recueillir des renseignements sur l'Abyssinie et sur
la route de l'Inde. Ils sont porteurs de lettres pour le
Prêtre Jean. Tous deux arrivent au Caire et, par la
mer Rouge, à Aden. Là, ils se
séparent: Covilhã va en Inde, à
Cananor, Calicut et Goa, puis s'embarque pour Sofala sur
la côte d'Afrique, d'où il regagne Aden et
Le Caire. Il apprend alors la mort de Paiva. Il
décide de se charger de la mission que celui-ci
n'a pu accomplir et entre facilement en Abyssinie, dont
il ne peut sortir: il s'y marie et y termine son
existence. Heureusement, avant son départ du
Caire, il avait pu faire parvenir en Europe des
renseignements sur la côte orientale d'Afrique et
la navigation dans l'Océan Indien.
C'est
le hasard, et aussi un roi du Portugal comblé et
blasé, qui donne à l'Espagne en 1492 le
chemin de l'Amérique, tandis que les Portugais
s'installent aux Indes. Christophe Colomb a-t-il eu
l'idée de chercher la route de l'Inde par l'ouest
en lisant la lettre que l'astronome florentin Toscanelli
aurait écrite, en 1474? Il ne semble
s'intéresser aux grands problèmes maritimes
qu'après son mariage avec la fille d'un marin
réputé (1480). Certains même ont mis
en doute son intention d'atteindre l'Inde par l'Ouest:
Colomb serait parti à l'aventure à la
recherche d'îles fabuleuses. En fait, il
connaît les travaux de Pierre d'Ailly,
imprimés à Louvain (1483) et où il
trouve l'idée, de la sphéricité de
la Terre, jointe à l'idée fausse que la
dimension du continent eurasiatique est de 225° et
que la Chine est par conséquent très proche
de l'Europe dans la direction de l'ouest. Rejoindre les
Indes par l'ouest, tel est le projet que Christophe
Colomb soumet, dès 1483, au roi de Portugal. Mais
ses exigences paraissent démesurées, il est
éconduit.
Colomb
s'adresse alors aux souverains espagnols. Mais ceux-ci
rejettent d'abord ses propositions. Ce n'est qu'en 1491,
pendant le siège de Grenade, que le Génois
obtient d'Isabelle l'autorisation d'organiser avec les
frères Pinzon, armateurs à Palos, une
petite escadre de 3 navires. Parti le 3 août
1492, il fait escale aux Canaries et, dans la nuit
du 11 au 12 octobre, aperçoit la terre. Ce sont
les îles Lucayes, à l'entrée du
détroit de Floride. Colomb se croit sur les
rivages de l'Asie. Il explore les Antilles, cherchant les
souverains de Cipangu (Japon) et de Cathay (Chine),
à qui il doit remettre ses lettres de
créance. Il découvre Cuba le 27 octobre et,
peu après, la future St Domingue, qu'il baptise
"Hispaniola". Mais il a perdu l'un de ses navires, ses
hommes sont fatigués et, le 15 mars 1493, 7 mois
après son départ, il rentre triomphalement
à Palos. Il est toujours persuadé d'avoir
atteint l'Asie...
Le Pape
Alexandre VI publie la bulle "Inter Coetera" en
1493. En effet, dès le 1er retour de
Colomb, les Portugais ont réclamé leur part
du monde. Ferdinand s'est adressé au St
Siège, le pape Alexandre VI est espagnol, et en
mai il accorde à son pays natal les terres
situées à l'ouest des Açores et au
Portugal les terres en deçà. Mais, devant
les réclamations du Portugal, la ligne de
démarcation, par le traité de Tordesillas
(7 juin 1494), est repoussée de 170 lieues vers
l'Ouest. Ce traité donne au Portugal la
moitié ouest du Brésil. Aux antipodes, le
traité de Saragosse (1529) accorde les zones
contestées, y compris les futures Philippines, aux
Portugais. Mais ceux-ci n'occupent pas les Philippines.
Les Espagnols s'y installent dès 1542. Leur nom
vient de celui de l'infant, le futur Philippe II.
Dès la fin du XVIème s., les "galions de
Manille" apporteront chaque année à
Acapulco la soie chinoise échangée contre
l'argent mexicain, au prix de périlleuses
traversées.
La
même année, C. Colomb réalise un
2ème voyage.
Le
Génois, Jean Cabot et ses trois fils,
passés au service d'Henri VII d'Angleterre,
reçoivent, en 1497, 5 navires, que chargent
les négociants de Londres et de Bristol. Ils vont
jusqu'au Cap-Breton et au Labrador. Leurs autres voyages
et ceux des bourgeois de Bristol n'ont guère de
résultats. Mais on espère toujours trouver
vers l'Asie la route du Nord-Ouest en contournant
En
1500, pour organiser le commerce de l'Inde, il
faut d'abord faire peur aux Arabes. Dans ce dessein, on
confie à Alvares Cabral une escadre de 13 navires
montés par 1 200 hommes (en mars). Pour
éviter les calmes du golfe de Guinée,
l'expédition utilise au maximum les alizés
et met le cap sur le Sud-ouest. Elle touche sans s'en
douter la côte de l'Amérique, au
Brésil. Cabral la baptise terre de la Vraie-Croix
(Vera Cruz, puis Santa Cruz), la longe pendant une
journée en descendant vers le sud, puis reprend sa
route vers l'Afrique après avoir
détaché un navire pour apporter à
Lisbonne la nouvelle de sa découverte.
Après des tentatives infructueuses de commerce sur
la côte orientale africaine, il arrive en
août devant Calicut. Il ne lui reste que 6
vaisseaux. D'abord en bons termes avec le roi, il se
brouille peu après avec lui, doit abandonner la
ville en incendiant 15 navires maures et rentre en
Europe.
C.
Colomb, même après son 4ème voyage en
1502, ne sera jamais détrompé, il
explore les Antilles, reconnaît l'embouchure de
l'Orénoque et l'isthme de Panama. Son aventure a
déçu les Espagnols qui lui reprochent de ne
pas avoir découvert la bonne route des
épices, ni rapporté d'or. L'essai de
colonisation tenté à St Domingue ne
réussit pas. Pendant son troisième voyage,
Ferdinand et Isabelle décident de lui enlever la
vice-royauté. Son remplaçant, Bobadilla,
ayant outrepassé les ordres reçus, les
souverains réparent, dans la mesure du possible,
l'affront fait au
navigateur.
Mais
ils ne lui rendent pas ses anciens pouvoirs et, s'ils lui
permettent un quatrième voyage, celui-ci
présente un objectif strictement
géographique: découvrir des terres
nouvelles. C'est ainsi qu'il explore la côte de
l'Amérique centrale, du Honduras actuel à
l'isthme de Darién. Il essaie vainement de trouver
de l'or en Costa Rica, revient échouer à la
Jamaïque après que sa flotte eut
été dispersée par les
tempêtes. En septembre 1504, il s'embarque pour
l'Espagne, où il arrive malade, et meurt en
1506.
En
février 1502, Vasco da Gama part pour une seconde
expédition avec 15 navires, suivi en avril par son
neveu, Estevão da Gama, à la tête de
5 autres unités. Il ne s'agit plus d'explorer,
mais d'imposer la domination portugaise. Vasco da Gama
reprend le chemin de l'Europe en février 1503,
laissant dans les mers des Indes une petite escadre de
surveillance sous les ordres de Sodré.
Le 24
juin, 1503 "L'Espoir", navire de 120 tx, et 60
hommes, commandé par Binot Paulinier de Gonneville
appareille d'Honfleur (avec le projet d'aller aux Iles
Molluques). Il atterrit sur les côtes du
Brésil (Sao Francisco). Il en repart en juillet
1504, le navire est attaqué au large des iles
anglo-normandes par des pirates. Des marins bretons de St
Malo et des normands de Dieppe semblent
déjà être venus dans cette
région avant lui.
Sodré
s'étant perdu corps et biens sur la côte
d'Arabie, une nouvelle expédition arrive en
1504, sous les ordres d'Alphonse d'Albuquerque,
qui construit un fort près de Cochin: c'est le
premier établissement permanent des Portugais en
Inde. Cochin ne doit pas rester le seul poste portugais,
si l'on veut briser définitivement le monopole
arabe et la coalition de tous ceux qui en profitent au
Moyen-Orient et jusqu'à Venise. Le roi Manuel
envoie un "vice-roi", Francisco d'Almeida, avec une
flotte de 15 vaisseaux, dont certains atteignent 1 500
tonneaux, et l'ordre d'organiser le nouvel empire. Le
vice-roi non seulement lève des tributs et
construit des forts, mais encore organise des flottilles,
dont certaines unités sont construites sur place;
il crée même un service de pilotage.
Dès lors le commerce des épices, des
pierres précieuses et des parfums est aux mains
des Portugais, dont les bases principales sont Cochin et
Cananor. Ils y apportent en échange des
métaux, plomb et cuivre, cinabre et mercure, du
corail, surtout des monnaies. Les navires arrivent en
septembre et repartent en janvier. Les plus rapides sont
rentrés à Lisbonne pour le mois de juin,
les plus lents pour l'année suivante.
On
commence à soupçonner, en 1505, que les
terres nouvelles découvertes par Colomb ne sont
pas l'Asie. Le florentin Amerigo Vespucci, qui a
participé à plusieurs des
expéditions vers l'Ouest, publie des lettres
où il prétend que l'on se trouve en
présence d'un "nouveau monde". Et en 1507,
un typographe de St Dié, Martin
Waldseemüller, imagine, de donner au nouveau
continent le nom d'América.
Le
pirate français, Pierre de Mondragon (normand)
écume, en 1508,le canal du
Mozambique.
Dans
l'océan indien, le successeur , en 1509,
d'Almeida, Albuquerque, est plus ambitieux. La plus
grosse partie des épices, négociée
sur la côte de Malabar, n'y est pas produite. Elle
vient de plus loin, des Moluques. Une flotte a atteint
Malacca, mais cette flotte est victime d'un guet-apens
musulman. Pour la venger, Albuquerque quitte sa capitale
de Goa en 1511, atteint Malacca, y obtient le concours
des Chinois, puis, grâce à eux, entre en
relation avec le Siam. Il va alors jusqu'à
Amboine, puis revient à Ormuz pour écraser
une coalition turco-arabe. C'est à ce moment que
se placerait son projet d'affamer l'Égypte en
déviant le Nil. Si vraiment il y pense, il n'a
guère le temps de réaliser son dessein: les
fièvres l'emportent en 1515.
Il
reste aux Espagnols à occuper le continent
américain au-delà du Brésil. Les
forces militaires espagnoles se heurtent à un
relief difficile, au climat tropical, à des tribus
sauvages et surtout à deux centres de
civilisation, l'empire des Aztèques au Mexique,
l'empire des Quichuas avec sa dynastie Inca, au
Pérou.
Jeanne
d'Aragon confie en 1511, à Juan d'Agramonte
une expédition de reconnaissance sur les
côtes de Terre-Neuve, elle lui impose l'obligation
d'embarquer 2 pilotes bretons. C'est la preuve que les
pêcheurs, de Bretagne fréquentaient ces
parages depuis plusieurs décennies, et
connaissaient bien ces mers et rivages. Il est à
noter qu'une île de Terre-Neuve, située sur
la côte orientale, au nord d'une île
nommée Belle Island (Belle-Île), porte le
nom "Groais Island". Sur l'une des plus vieilles cartes
du nouveau Royaume de France (Canada) cette île,
porte le nom de Groye, signe que des groisillons sont
venus dans ces contrées.
Aucun
doute n'est plus possible, en 1513, après
le voyage de Balboa, qui, du haut des montagnes de
Panama, découvre vers l'ouest un vaste
océan.
Le
Portugais Magellan, qui, longeant la côte
d'Amérique du Sud, franchit en 1519, le
détroit de 600 km, auquel il donne son nom, et
s'aventure dans l'océan, qu'il appelle Pacifique,
jusqu'aux Philippines, qu'il aborde après un
trajet de 4 mois et où il périt dans un
combat contre les indigènes.
Hernán
Cortés débarque sur la côte mexicaine
avec 660 hommes et crée le fort de la Vera Cruz.
Trouvant facilement l'appui des tribus soumises par les
Aztèques, à qui leurs croyances religieuses
promettent un libérateur venant de l'Est, il
marche sur Mexico, capitale de l'empire. Son chef
l'accueille en ami. Six jours après, des soldats
espagnols ayant été attaqués par des
Mexicains, Cortés fait celui-ci prisonnier et
organise un véritable protectorat.
Si l'on
trouve de l'or aux Antilles, de l'or et de l'argent au
Mexique, l'immense et brillant empire Inca, couvert de
travaux gigantesques, doit fournir aussi en abondance les
deux précieux métaux. N'est-ce pas
l'Eldorado? Deux aventuriers espagnols, Pizarre et
Almagro, s'associent pour la conquête.
En
Septembre 1522, le pilote de Magellan, El Cano,
regagne San Lucar (Espagne), par le cap de
Bonne-Espérance. C'est le 1er tour du monde: il a
duré 3 ans. Sur 5 navires et 239 hommes partis, il
n'en revient qu'un, le "Victoria", et 21 hommes. La
charge d'épices, prise aux Molluques, suffit
à payer la campagne.
Sur la
route des épices, des navires français
apparaissent dans l'Inde en 1522, devant Diu. Les
frères Jean et Raoul Parmentier, qui naviguent
pour le compte de l'armateur dieppois Jean Ango,
atteignent Sumatra où ils trouvent la
mort.
François
1er charge, en 1524, Verrazano d'exploiter les
côtes du Nouveau Monde. Il atteint la Caroline du
Nord, longe la côte jusqu'en Nouvelle-Écosse
et rentre à Dieppe. Prenant les eaux
situées au-delà des Outer Banks de Caroline
pour le Pacifique, il contribue à entretenir
l'illusion d'un passage vers la Chine.
Le 15
juin 1526, Pierre Caurray quitte Honfleur. Il
arrive à Sumatra au cours de l'été
1527. Au retour, il s'échoue fin 1527 au large de
Madagascar.
A la
fin de l'année 1528, Jean Breuilhy, à bord
de la "Marie Bon Secours" quitte Honfleur à la
recherche de P.Caurray. À Diu, les
autorités portugaises saisissent ce bateau et son
équipage qui disparut corps et biens.
Le 2
avril 1529, Le "Sacre" navire de 120 tx et "la
Pensée" navire de 200 tx armés par Jean
Ango et commandés par Jean et Raoul Parmentier
appareillent de Dieppe pour Sumatra où ils
arrivent le 20 octobre. Plus de la moitié des
marins et les 2 capitaines y meurent de fièvres.
Les survivants réembarquent le 22 janvier 1530
pour arriver à Dieppe en juillet 1530.
En
1532, Pizarre la commence la conquête du
Pérou avec 170 hommes, 70 chevaux et 3 arquebuses
et la termine avec les renforts que lui amène
Almagro.
François
1er accorde 6 000 livres à J. Cartier, en
1534, pour financer un voyage en "Terres neuves".
Le 20 avril, J. Cartier appareille de St Malo avec 2
navires de 60 tx "le Triton" et le "Goéland" et 61
hommes après un recrutement difficile. Il entre le
11 juin dans l'estuaire du St Laurent.
Le 19
mai 1535, nouveau voyage de J. Cartier, il
appareille de St Malo avec "la Grande Hermine" 100 tx,
"la Petite Hermine" 60 tx et "l'Émerillon" 40 tx,
et 112 hommes. Il remonte le St Laurent jusqu'à
Hochelaga (futur Montréal).
Pizarre
fonde sa capitale: Lima. Mais les 2 chefs se brouillent.
Almagro, fait prisonnier par Pizarre, est
étranglé (1538). Pizarre est tué par
les soldats d'Almagro (1541). Le pays vit dans l'anarchie
lorsque Charles-Quint, en 1547, y envoie un gouverneur.
Ainsi est créé l'Empire espagnol,
très différent de l'Empire portugais
d'Orient. Les 2 empires sont fondés sur le
principe du monopole commercial, mais pour celui
d'Amérique, il y a une extension territoriale. Une
population européenne y émigre et une
administration y est instaurée, aux ordres de
vice-rois et de capitaines généraux. Il
manque la main-d'uvre: on la recrute parmi les
Indiens pour le travail forcé des mines ou des
terres.
L'Église
n'est pas restée inactive. Des missions ont
été organisées, des couvents et des
églises bâtis. Les Indiens sont
amenés à la foi catholique d'une
façon assez superficielle. On s'efforce de
protéger les indigènes contre les abus des
colons. Le dominicain Las Casas ne cesse de
démontrer les atrocités que ceux-ci
commettent contre ceux-là. Le malheur est que,
pour les sauver, on trouve un remède pire que le
mal: s'adresser aux Noirs d'Afrique, qu'on achète
comme esclaves et qu'on envoie en Amérique dans
les pires conditions physiques et morales. C'est la
traite des Noirs qui commence et qui durera jusqu'au
XIXème s.
Le
traité des Capitulations en 1536 accorde
à François 1er des avantages commerciaux
dans le Levant. Si, par ailleurs, l'amiral de Coligny
évoque une "France antarctique", il s'agit
probablement d'y trouver un refuge pour les
huguenots.
En
1537, les rares tentatives de colonisation n'ont
guère de résultats, et il faut se garder de
prêter à des découvreurs
français des projets trop précis. À
toute expansion coloniale, il faut des raisons internes.
Elles n'existent guère dans la France du
XVIème s.. Les guerres de religion affaiblissent
l'État et accaparent les énergies
disponibles. Il se produit sans doute une certaine
évolution vers des structures capitalistes: le
port du Havre est créé en 1537 et, par
Dieppe, on a commencé à entrer en contact
avec les richesses des nouveaux mondes. Toutefois, la
population française est rurale à 90 %.
L'économie est pauvre, cloisonnée,
écrasée sous les prélèvements
seigneuriaux et royaux et secouée par des crises
de subsistance. Les habitudes de thésaurisation
persistent (et pour longtemps encore) dans la petite
bourgeoisie des villes et des campagnes. Le personnel des
centres de spéculation, comme Lyon, est souvent
étranger. Les bourgeois enrichis abandonnent les
métiers de la boutique ou de l'atelier. Ils
achètent des terres et, grâce à la
vénalité des offices, accèdent
à la noblesse de fonction. En dépit des
initiatives de l'amiral de Coligny, les guerres de
Religion l'empêchèrent de soutenir
l'effort.
Jacques
Cartier obtient de François 1er en 1540,
qu'il prenne possession du Canada et d'Hochelaga. C'est
toutefois un échec pour lui qui cherchait la route
qui pouvait conduire au fabuleux Cathay de Marco Polo. Il
n'a trouvé ni or ni pierres
précieuses.
Les
armateurs de St Malo arment, en 1541, 24 navires
(de 60 à 100 tx) pour la pêche à la
morue à
Terre-Neuve.
Le
23 mai, nouveau voyage de Jacques Cartier, qui appareille
avec 5 navires transportant les 1500 premiers colons du
Canada.
La
Nouvelle-France tombe alors dans l'oubli pour 50 ans. Il
ne reste guère qu'un trafic: le troc de la
bimbeloterie contre des fourrures que pratiquent les
pêcheurs français de Terre-Neuve et qui
enrichit les ports de Normandie et de
Bretagne.
Le 18
septembre 1544, a la suite de la 4ème
guerre contre Charles Quint, lasignature du
"Traité de Crépy" interdit aux
Français tout armement maritime pour les Indes et
les Antilles, il vise notamment la piraterie
française.
Le 12
juillet 1555, le protestant Durand de Villegagnon
quitte Le Havre avec 3 navires (2 de 200 tx armés
à la guerre et 1 de 100 tx) et 600 hommes. Ils
arrivent le 30 octobre sur les côtes
brésiliennes (Cap Frio) et le 10 novembre dans la
Baie du Garrabara (Rio de Janeiro), sans qu'aucune suite
soit donnée à ce voyage. Il doit
céder la place aux Portugais en 1559.
Le 18
février 1562, deux navires de 150 tx et de
60 tx, armés de 150 hommes commandés par
deux protestants, Jean Ribault et René Goulaine de
Laudonnière, quittent Le Havre pour la Floride,
où ils arrivent le 30 avril. Ils débarquent
quelques hommes et repartent en France chercher d'autres
colons.
En mars
1564, suite à la paix d'Amboise,
René Goulaine repart pour la Floride avec 3
navires. 300 hommes débarquent le 25
juin.
En
avril 1565, Jean Ribault repart de nouveau pour la
Floride avec 600 paysans. Ils débarquent le 25
août. Tous les membres de ces expéditions
sont massacrés par les espagnols le 20
septembre.
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