Histoire de l'île de Groix ...

  

 

 

 

Sommaire

des pages de la guerre 1914/1918

 

1914

1915

1916

1917

1918

 

 

 

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Les groisillons dans la tourmente de 1914/1918

1 - L'année 1914
 

La saison du thon a bien commencé, et la moisson s'annonce excellente, mais...  

François-Ferdinand et son épouse

 Juin

Les élections législatives du printemps ont donné une majorité à la gauche (SFIO), le samedi 13, le gouvernement conduit par Viviani, entre en fonctions.

Le dimanche 28 juin 1914, l'archiduc François-Ferdinand d'Autriche, héritier de l'empire austro-hongrois et son épouse sont assassinés à Sarajevo, par un "terroriste" serbe, Cavrilo Princip (19 ans). L'assassin est soupçonné d'appartenir à l'organisation secrète (Main Noire), manipulée par le chef des services de renseignement de Belgrade (colonel Dimitrievitch). Cette organisation prône la réunion de tous les Slaves du Sud autour de la Serbie, principal Etat slave des Balkans. A ce titre, elle s'indigne de l'annexion de la Bosnie-Herzégovine par l'Autriche en 1908.

Leur mort laisse l'Europe indifférente dans les premiers jours. Le prince, que François-Joseph 1er n'aimait pas, est enterré à Vienne en catimini. Mais les diplomates de tous bords se saisissent bientôt de l'incident comme d'un exutoire à toutes les tensions qui traversent le continent. Imputé à la Serbie par les autrichien, l'assassinat sert de prétexte au déclenchement de ce qui deviendra la 1ère Guerre Mondiale.

Depuis 1871, l'Europe vivait sous un régime entre paix et guerre, la "paix armée". Après que l'Allemagne ait conclu sa "Triple Alliance" (Allemagne, Autriche-Hongrie, Italie) en 1882, la France mena à bonne fin de 1893 à 1907 la "Triple Entente" pour rétablir l'équilibre européen (France, Russie, Royaume-Uni). Toutefois, l'assassinat de l'archiduc héritier d'Autriche en juin 1914 offrait à l'Allemagne un prétexte pour déclarer la guerre à la Russie.

arrestation de C. Princip

 Juillet

Le mardi 14, jour de la fête nationale, Jean Jaurès appelle à la grève générale internationale contre la guerre.

L'Autriche adresse un ultimatum à la Serbie le 23. Elle prend le risque d'une guerre localisée pour simplement humilier la Serbie.

Le mardi 28, Vienne déclare la guerre à la Serbie. Le 30 juillet, apprenant que Belgrade a été bombardée par les Autrichiens, le tsar de Russie Nicolas II décrète la mobilisation générale au nom de la solidarité slave.

Le mercredi 29, le Bureau Socialiste International demande à tous les partis socialistes des pays menacés par la guerre d'organiser des manifestations pacifistes.

Le jeudi 30, apprenant que Belgrade a été bombardée par les Autrichiens, le tsar de Russie Nicolas II décrète la mobilisation générale au nom de la solidarité slave.

A Paris, le président de la République, Raymond Poincaré, et le président du Conseil,  René Viviani, rentrent d'un voyage à Saint-Pétersbourg, auprès de leur allié, le tsar. Ils sont acclamés par la foule au cri de «Vive l'armée» ou même «Vive la guerre!». Raymond Poincaré a donné au tsar l'assurance de «seconder entièrement, dans l'intérêt de la paix générale, l'action du gouvernement impérial». C'est fort de cette assurance que le tsar a engagé la mobilisation générale.

En guise de mesure d'apaisement, la France ordonne le recul de son armée à 10 kilomètres de sa frontière avec l'Allemagne.

Le vendredi 31, dans un café de Paris, le Croissant, un anarchiste, Raoul Villain, assassine Jean Jaurès. Le leader respecté des socialistes était l'un des derniers partisans de la paix avec Joseph Caillaux; le premier par humanisme, le second par raison

Août

Le samedi 1er, l'ordre de mobilisation générale est déclarée en France et en Allemagne. L'Allemagne déclare la guerre à la Russie.

A la fin de l'après-midi, le tintement répété de la grosse cloche de l'église du bourg, le tocsin, alerte les habitants de l'île "Ecoutez comme ça sonne ! On dirait que la guerre est déclarée… C'est la guerre ! " … Tous savaient que ça allait mal depuis quelques jours : les événements se précipitaient. Mais beaucoup espéraient qu'on n'arriverait jamais à cette situation.

C'est vers 16 heures que l'ordre de Mobilisation Générale a été placardé dans tous les bureaux de poste. Une telle nouvelle parvient rapidement, même jusqu'à Groix. Le premier jour de la mobilisation est le 2 août 1914 à 0 heure. Les hommes doivent partir le deuxième jour, comme l'indique leur fascicule de mobilisation, bon citoyen et bon soldat, respectueux des ordres, ils partent pour Lorient le 3 août au matin, sa musette bourrée de victuailles sur le dos, parmi eux Emile Le Clanche, du bourg...

Dimanche 2, le caporal Peugeot (44ème R.I., de Belfort) et le lieutenant Mayer (5ème Chasseurs à Cheval Prussien, de Mulhouse), s'entretuent au cours d'une escarmouche, près de Joncherey (nord de Belfort). Ce sont les premiers morts militaires français et allemand de la guerre.

Les groisillons affectés à l'infanterie rejoignent le 62ème régiment d'infanterie (62ème R.I.) de Lorient, ils participeront dans une première période à la campagne conduite par la IXème armée commandée par le général Foch . Le 62ème appartient au 11ème corps d'armée (11° C.A.), 22ème division (22° D.I.), 43ème brigade (43° br.) commandée par le colonel Costebonnel. Le 17 septembre 1914 le 11° C.A. sera rattaché à la Vème Armée commandée par le Général Franchet d'Esperey.

Cliquez ici et retrouvez le journal de marche officiel du 62ème R.I.

 

La 22ème Division d'Infanterie, à la mobilisation fait partie du 11ème 
C.A (IVème armée), son Q.G. est à Vannes, sous les ordres du général
 Pambet,
 elle est composée, à cette date :
- de la 43ème brigade, Q.G. à Vannes, colonel Costebonnel, comprenant 
le  62ème R.I. de Lorient et le 116ème R.I. de Vannes.
- de la 44ème brigade, Q.G. à Quimper, général Chaplain comprenant le
19ème R.I. de Brest et le 118e R.I. de Quimper.
- du 35ème R.A.C. Q.G. à Vannes, colonel Ely.
- de la cie 11/2 du génie, capitaine Huot.
- du 6ème escadron du 2ème chasseurs, Q.G.à Pontivy, capitaine Saint
 Gal

 

 

Beaucoup d'autres sont embarqués ou rejoignent les 700 apprentis fusiliers et leurs instructeurs qui quittent leur casernement flottant, le "Calédonien", un ancien transport de bagnards. Ils rejoignent les réservistes du dépôt de Lorient pour former le troisième bataillon de fusiliers marins, parmi eux il y a Laurent DERRIEN, de Ker Port-Lay, Laurent STEPHANT, de Port-Lay, Louis BLOREC de Locmaria, Théodore et Eugéne METAYER de Locmaria, Yves SALAHUN de Locmaria, Jean TONNERRE de Locmaria.

Lundi 3 : l'Allemagne déclare la guerre à la Belgique (en violant la neutralité de ce pays) qui a rejeté l'ultimatum de la veille. Et l'Allemagne se déclare la guerre à la France évoqianrt de faux prétextes (incidents de frontière)

Depuis l'alliance franco-russe l'état-major allemand s'était préparé à une guerre sur deux fronts, à l'Est contre la Russie à l'Ouest contre la France. L'économie allemande ne pouvant soutenir un conflit de longue durée, l'essentiel des forces du Reich devait être tourné contre la France. L'armée française pouvait être battue en six semaines, avant l'entrée en ligne des armées russes, lentes à se mobiliser et contre lesquelles on se retournerait ensuite. C'était, pensait-on à Berlin, "question de vitesse et de force brutale".

 

Le plan des opérations est conçu depuis 1905 par le chef d'état-major de l'époque, le général von Schlieffen. Il reposait sur une grandiose stratégie de l'enveloppement, sensiblement modifié par le nouveau commandant en chef, le général von Moltke, le neveu du vainqueur de 1870. Contrairement aux recommandations expresses de Schlieffen, Moltke avait diminué l'effectif de la masse de manœuvre allemande, l'"aile marchante". Cette aile droite, forte d'une soixantaine de divisions, traversant la Belgique par surprise envelopperait les armées françaises d'un gigantesque mouvement en coup de faux et les contraindrait à la capitulation, l'action de l'aile gauche renforcée assurant l'encerclement complet.

Du côté français, bien que la doctrine militaire fût résolument offensive, il n'était pas question, pour des raisons politiques, de porter atteinte à la neutralité belge, en dépit des soupçons que l'on eut sur les intentions allemandes.

Mardi 4, l'armée allemande franchit la frontière belge; cela pousse, la Grande-Bretagne à prendre part au conflit, elle déclare la guerre à l'Allemagne

Les armées en présence

En août 1914, l'opinion générale etait que cette guerre, qui s'annonçait "fraîche et joyeuse", serait rapidement conclue par une rencontre décisive entre les deux principales armées : l'armée allemande et l'armée française. Pour l'Allemagne cette campagne rapide consistait à se jeter sur la France avec la totalité de ses forces afin de la mettre tres vite hors de combat, en un mois tout au plus, puis à se retourner contre la Russie. Cependant, l'Allemagne ne pouvait pas compter sur une supériorité numérique aussi marquée que 1870. L'armée de choc qu'elle se préparait à lancer contre la France (un million et demi de combattants) les Français, avec l'aide des Belges et des Anglais, opposaient des forces sensiblement équivalentes. L'Allemagne, néanmoins, comptait sur l'avantage incontestable de sa préparation technique et sur les formidables réserves de son artillerie lourde de campagne.

L'armée française comporte un peu plus de 2 millions d'hommes

Armée territoriale

Il s'agit de la portion de l'armée à laquelle appartenaient tous les Français au sortir de la réserve de l'armée active. La situation militaire de la France était alors (1910) un sujet de première importance nationale, dans tous les esprits, se manifestant de toutes les manières, y compris dans les actes d'état civil des citoyens; la situation exacte de chacun à un moment important de sa vie lui était ainsi rappelée. Après le service militaire de deux ans, chaque Français restait dans la réserve de l'armée active pendant onze ans, puis dans l'armée territoriale pendant six ans, enfin dans la réserve de l'armée territoriale pendant les six années suivantes. En 1914, à la déclaration de guerre, les hommes passés dans la réserve de l'armée territoriale furent néanmoins mobilisés dans une formation militaire, à moins d'être " affecté spécial " (emploi civil intéressant la défense nationale: armement, etc….).

Les réservistes de l'armée territoriale furent alors employés à des gardes statiques (chemins de fer, usines de guerre, camps militaires, etc.) en dehors de la zone des combats, mais les pertes considérables de l'armée française à partir de 1916 eurent pour conséquence leur départ pour le front, la territoriale étant amalgamée à l'active pour constituer des unités combattantes de même valeur militaire, afin de pouvoir résister aux assauts de l'armée allemande.

Mercredi 5, le Monténégro déclare la guerre à l'Autriche

Jeudi 6, l'Autriche à la Russie, la Serbie déclarent la guerre à l'Allemagne.

Les premières troupes anglaises débarquent sur le sol français.

Au cours de la prise d'armes (le 6 ou le 7) marquant le départ du 62ème R.I., le colonel Costebonnel, dans une harangue empreinte du plus pur patriotisme, indique à tous le chemin du devoir et la grandeur du sacrifice que la Patrie attend d'eux. Un immense cri de "Vive la France" répond à ces nobles paroles.

vendredi 7, première offensive française en Alsace

Le président du Conseil, Viviani, demande aux femmes de France de remplacer les hommes pour les travaux des champs : "Remplacez sur le champ du travail ceux qui sont sur le champ de bataille".

Ce jour (ou le 8 à 4h.), le 62ème R.I. s'embarque à Lorient. Le trajet de la caserne à la gare (sous une pluie terrible) est, pour le régiment, une véritable marche triomphale. Une foule émue l'entoure et l'acclame sans discontinuer. Le sous-préfet, la municipalité et toute la population lorientaise se trouvent à la gare pour saluer le drapeau et les bataillons qui partent pour la frontière. L'histoire officiel dit que les soldats sont animés d'un enthousiasme indescriptible; des cris de joie s'élèvent de toutes parts, on a l'impression que chacun s'apprête à faire consciencieusement son devoir pour défendre le sol sacré de la Patrie menacée et déjà envahie.

Le train réalise l'itinéraire Nantes, Le Mans, Chartres, Reims, Verdun en plus de 36 h. En cours de route, à Versailles, le régiment apprend la prise de Mulhouse. Cette nouvelle soulève de nombreux cris d'enthou-siasme.

Samedi 8, le Monténégro déclare la guerre à l'Allemagne

Dimanche 9, vers 22h., le 62ème débarque, au clair de lune, à Châtel-Chéhery (Ardennes); aux confins de la forêt de l'Argonne, près d'Apremont.

D'autres éléments de la 22ème D.I., sont débarqués à Grandpré (Ardennes)

Lundi 10, le 62ème, après une marche sous un soleil épouvantable, cantonne à Germont et à Belleville (3ème bat.). La troupe est bien accueillie.

Mardi 11, les marches de concentration commencent. Les 11, 12, 13 et 14, le 62ème stationne à Oches. Pour éviter tout incident, les officiers consignent les débits de boissons. La troupe couche plusieurs nuits dans les bois de la Besace.

Mardi 12, la France et la Grande-Bretagne déclarent la guerre à l'Autriche

La guerre de mouvement : de l'invasion (2-16 août 1914) aux batailles des frontières (17-25 août 1914)

Les deux adversaires prennent simultanément l'offensive. L'Etat-major allemand, sur ordre du général Moltke, monte la manœuvre de tres grande envergure préparée sept ans plus tôt et connue sous le nom de "plan Schlieffen". Celle-ci projetait de tourner la barrière fortifiée de Belfort - Verdun et de déborder par le nord la ligne de bataille française. Cette opération nécessitant la violation des territoires belge et luxembourgeois. Le Grand Quartier Général français la jugeait utopique. Elle se réalisa pourtant point par point. Dès le 2 août, les troupes allemandes envahissaient le Luxembourg et violaient la neutralité de la Belgique. Le 4, elles commençaient le siège de Liège.

Moltke jette 7 armées comportant 78 divisions dans cette bataille, 5 armées étant prévues pour l'investissement de la Belgique et du Luxembourg (nota: afin de distinguer les armées allemandes des armées françaises, les chiffres romains designeront les allemandes et les chiffres arabes les françaises) :

* La Ire armée, commandé e par von Kluck. Forte à elle seule de 30 divisions elle constitue l'aile droite marchante, qui doit assurer le mouvement enveloppant (conforme au plan Schlieffen). Elle doit faire mouvement selon une ligne de progression Bruxelles - Tournai.

* La IIe armée, commandée par von Below, à gauche de von Kluck. Elle suit une ligne de progression Charleroi - Maubeuge.

* La IIIe armée, commandée par von Hausen. Elle progresse par la ligne Liège - Namur et la trouée de Chimay.

* La IVe armée, commandée par le duc de Wurtemberg. Elle progresse sur la ligne Neufchâteau - Sedan.

* La Ve armée, commandée par le Kronprinz. Elle fait mouvement par Thionville et la trouée de Stenay.

* La VIe armée, commandée par le prince Ruprecht de Bavière et la VIIe armée, commandée par le général Heeringen, forment l'aile gauche allemande et progressent de part et d'autre de la trouée de Charmes.

Le Grand Quartier général français (G.Q.G.) commande par le général Joffre ne pense pas que les Allemands puissent dépasser la Meuse. Il compte paralyser la manoeuvre ennemie par une attaque foudroyante en Alsace-Lorraine et dans les Ardennes. Ce plan d'attaque qui s'opposait au plan allemand était dit "plan XVII". Il prévoyait de concentrer sur le terrain les armées comme suit :

* La 1re armée, commandée par le général Dubail, entre Belfort et Lunéville

* La 2e armée, commandée par le général de Curières de Castelnau, de Nancy à Nomeny ;

* La 3e armée, commandée par le général Ruffey, entre la Moselle et Audun-le-Roman ;

* La 5e armée, commandée par le général Lanrezac (dont le 1er corps est commande par le général Franchet d'Esperey), renforcée par un corps anglais et prolongée par le corps de cavalerie du général Sordet, entre Montmédy et Longuyon ;

* La 4e armée, commandée par le général de Langle de Cary, est concentrée entre Bar-le-Duc et Commercy.

Joffre, estimant que l'attaque principale aura lieu dans une zone Metz - Thionville - Luxembourg, intercale la 4e armée entre la 3e et la 5e.

Malheureusement, le G.Q.G. méconnaît le nombre exact des forces ennemies qu'elle aura à combattre. Il ignore que les divisions de réserve ont été ajoutées à celles d'active. L'offensive française (2e armée) est brisée à Morhange, en Lorraine, dès le 20 août, puis dans les Ardennes (4e armée), les 22 et 23 août. L'aile gauche, la 5e armée et les quatre divisions anglaises de French, attaquées à Charleroi et Mons, se trouvent menacées d'enveloppement. Elles doivent battre en retraite le 23 août. C'est l'effondrement du plan XVII de Joffre. La bataille des frontières est perdue. Le 24 les Allemands entament l'invasion du nord et du nord-est de la France. Par une avance rapide de leur aile droite, ils s'efforcent d'envelopper les armées françaises en retraite, ou de les refouler jusque la frontière suisse. Mais Joffre ne se laisse ni troubler, ni envelopper. Il ordonne une retraite générale que les Allemands prennent pour une fuite· Or, dès le 25 août, ces derniers commencent à essuyer quelques défaites locales (trouée de Charmes, bataille de Guise...).

Jusqu'au 15, la guerre commence bien et tous les engagements sont favorables à l'armée française. Diplomatiquement, politiquement, la France n'a qua se louer des circonstances. L'Allemagne a multiplié les fautes. Son intérêt était d'avoir l'Italie avec elle pour attaquer notre frontière des Alpes. Il était aussi de ménager l'Angleterre. Elkle avait si bien compris ce dernier point que, grossièrement, elle avait proposé au cabinet de Londres un marché : le Royaume-Uni eût assisté impassible aux événements, à l'invasion de la France que rêvait le Kaiser, et Guillaume II se fût borné à prendre nos colonies. "Vous me proposez la honte", a dit Edward Grey. L'Italie est resté neutre, en attendant qu'elle fonce sur les provinces autrichiennes devenues vides de soldats et qu'elle réalise le voeu national: la reconquête de Trente et de Trieste. L'Angleterre, qui certes n'eût pas abandonné la France, mais dont les mouvements eussent pu être plus lents, a été avertie des prétentions allemandes. Elle préparait son armée et sa flotte pour se trouver en ligne dès l'ouverture de la guerre. Dans l'ordre politique, l'Allemagne s'est lourdement trompée. Elle nous croyait la France divisée, irrémédiablement, déchirée par les partis politiques, incapables d'entente. Or, son agression a immédiatement réalisé une solidarité, une fraternité telles que, de mémoire d'hommes, on n'en trouverait pas de comparables. Ceux qui niaient jusqu'à l'utilité des armées ont marqué un enthousiasme admirable pour la défense nationale.

L'Allemagne a commis la faute initiale d'attaquer la Belgique, pensant que les Belges ne résisteraient pas à l'armée allemande, qu'ils seraient trop heureux de coopérer à l'agression contre la France et de faciliter la marche des soldats germaniques. Ce de Möltke était si bien persuadé de leur lacheté et de leur félonie qu'il avait essayé de négocier avec le cabinet de Bruxelles. Il a été bien reçu; ses troupes ont été encore mieux reçues devant Liège. Il a trouvé la bravoure à la place de la lâcheté, la loyauté indéracinable à la place de la félonie. L'attaque de la neutralité belge a d'abord porté à l'Allemagne un préjudice moral énorme.

Dans le monde entier, la réprobation a éclaté contre le prodédé honteux de la Germanie barbare. Mais il y plus. Comme les Belges ont écrasé à Liège un corps d'armée allemand, comme 120.000 Allemands au total ont été arrêtés devant la ville, l'état-major français, l'état-major belge, l'état-major anglais ont eu le temps de prendre toutes leurs précautions.Les troupes françaises débordent la frontière, nos deux ailes sont en Belgique et en Alsace, notre concentration a pu s'achever, et les Russes sont entrés en Prusse.

Vendredi 14, début de la 2ème offensive française en Alsace (conduite par le général Pau). Prise de Thann. Début de l'offensive française en Lorraine et sur les Vosges (1re Armée, général Dubail, et 2ème Armée, général de Castelnau).

Le samedi 15, l'armée belge se replie dans son ensemble sur Anvers. A partir de cette date (jusqu'au 29), contre toute attente, la Prusse orientale est envahie par les troupes russes (elles-mêmes arrêtées à Tannenberg).

 

Le 62ème se porte dans la direction de Sedan. Après une marche sous une pluie terrible, presque une tempête, atteint Noyers (au sud de Sedan). Les hommes attendront 3 h. sous la pluie, après cette longue marche très fatigante.

Le dimanche 16, à 8h, un peloton de la 8ème cie du 62ème est envoyé à Bazeilles en soutien de la cavalerie divisionnaire opérant sur la rive droite de la Meuse en liaison avec la 21ème D.I. A 13h., la 9ème cie est dirigée sur Vadelincourt pour reconnaître les passages de la Meuse; à 16h., le 62ème, qui fait partie de l'avant-garde de la division, se porte sur Muno par Douzy, Pourru St Rémy et Messincourt. Il atteint Muno (Belgique) à 22h. où il s'installe en cantonnement d'alerte couvert par le bat. Voilliard qui prend les avant-postes. L'accueil de la population est excellent; elle offre à ces braves soldats français boissons et tabac à volonté.

Lundi 17 : Confirmation du succès des armées françaises dans la vallée des Vosges. Les Allemands se replient en grand désordre vers Strasbourg, laissant entre nos mains une quantité énorme de matériel. En Lorraine et en Alsace nos troupes ont dépassé en moyenne de 10 à 20 km la ligne frontière.

 

C'est seulement ce jour que peloton de liaison cycliste en tête, les fusiliers marins défilent sur le cours Chazelles, les fusilier quittent Lorient, la plupart ne reviendront pas. Comme en 1870, les fusiliers marins ont d'abord pour mission de défendre la capitale. Les Lorientais sont rejoints par des renforts de Rochefort, Brest, Cherbourg et Toulon. Le contre-amiral Ronarc'h, né à Quimper le 22 juin 1865, a fait ses études au lycée Dupuy-de-Lôme à Lorient. Il a servi dans l'océan Indien, en mer de Chine et dans l'escadre de Méditerranée. Lorsque la guerre éclate, la Marine dispose d'un surplus d'effectif de 7 000 hommes qu'elle ne peut pas utiliser à bord de ses bâtiments. Elle décide de créer une brigade de fusiliers marins. Le jeune contre-amiral Ronarc'h, nommé en juin 1914, prend le commandement d'une brigade forte de 6 000 hommes qui deviendra célèbre. Mais bientôt dans le nord, les Allemands menacent de bousculer les défenses belges, la défense de Paris n'est plus à l'ordre du jour. La brigade doit se porter au-devant de l'ennemi dans les Flandres pour bloquer le passage vers la mer.

A 6h., l'avant-garde de la 22ème division reçoit à Muno l'ordre d'occuper Escombres (France) et les hauteurs voisines pour couvrir la division; à 7h., le régiment quitte Muno pour Escombres où il s'installe en cantonnement d'alerte

Mardi 18, rapport concis et éloquent du général Joffre, daté de Vitry-le-François : "Nous tenons les vallées des Vosges : les Allemands ont battu en retraite au sud de Sarrebourg. Nous occupons une bonne partie de la Lorraine annexée, nous sommes les maîtres de la vallée de la Seille et dominons celle de la Sarre; Château-Salins est à nous. Partout notre artillerie a produit un effet démoralisant sur l'adversaire. Mais cette guerre de mouvement est très incertaine".

A 4h., le 62ème, qui a reçu la mission d'organiser la position, en vue d'une première résistance sur les lignes nord et est d'Escombres pour forcer l'ennemi à un déploiement prématuré, sans se laisser accrocher, commence les travaux de défense qui sont terminés à 11h.

Mercredi 19, La reprise de Mulhouse par l'Armée d'Alsace du général Pau a été des plus brillantes (?), car les ennemis ont été repoussés en désorde au delà du Rhin, sur le duché de Bade, et nos avant-gardes sont en marche vers Colmar et Neuf-Brisach.

Jeudi 20 août, les allemands entrent dans Bruxelles, ville ouverte.

Contre-offensive allemande en Alsace. Repli de la VIIème Armée française. Contre-offensive allemande en Lorraine. Batailles de Dieuze et de Morhange.

La 22ème D.I. marche encore offensivement vers le nord. Le 62ème formant avant-garde de la division quitte Escombres à 20h. et se porte dans une marche extrêmement pénible à travers les bois jusqu'à Auby (Belgique) par Dohan, où il passe la nuit. L'accueil est de nouveau excellent.

Vendredi 21 août : En Lorraine, retraite des détachements français les plus avancésvers les corps principaux, qui couvrent les ouvrages avancés de Nancy et s'appuient sur le Donon. En Belgique, l'armée belge est entrée presque toute entière dans le camp retranché d'Anvers. La cavalerie allemande a traversé Bruxelles, puis a continué sa route, la ville étant frappée d'une contribution de 200 millions de francs. Les Allemands se sont massés devant Namur et leur artillerie lourde a commencé à envoyer des boulets sur la place. Ils poursuivent leur marche vers l'ouest, c'est à dire vers la frontière française, par les deux rives de la meuse.

La marche offensive de la 22ème continue et le 62ème arrive à Bertrix à 16h. où il cantonne en se couvrant par des avant-postes

Samedi 22 août : La retraite des troupes françaises s'est accentuée en Lorraine. Elle a coûté des pertes assez sérieuses, mais l'ennemi a subi des pertes égales. Il a été arrêté par nos contingents au nord de Lunéville et aucune de nos unités n'a encore traversé la Meurthe. D'ailleurs les opérations qui ont lieu sur ce front n'auront qu'une valeur secondaire. Tout l'intérêt se porte sur la Belgique. Ici, les Anglais ont pris contact à Waterloo avec les Allemands. Heurts aux forces ennemies en avant de Charleroi, entre cette ville et Namur, c'est-à-dire sur un champ de bataille classique et qui a été souvent favorable aux armées françaises. Les troupes allemandes cantonnées à Bruxelles ont quitté précipitamment cette capitale pour descendre vers Namur par Nivelles.

Combats dans les Ardennes ; Paliseul, Neufchâteau, Bertrix, Virton, Ethe et Rossignol.

Au matin, un petit poste de la 12ème cie du 62ème aperçoit une patrouille de cavaliers allemands; il la repousse.

Vers 10h., 2 avions ennemis apparaissent à très faible hauteur; les avant-postes ouvrent le feu, l'un des appareils est abattu, mais l'autre réussit à rentrer.

Vers midi, la division reprend la marche en avant. Le 62ème se dirige sur Paliseul, mais, avant d'arriver, on entend la fusillade. Le général de division pousse le 62ème sur Maissin pour appuyer les régiments déjà engagés. Le bat. Voilliard forme l'avant-garde.

Les Allemands ont mis le feu au village. Arrivant par le sud, on entend le bruit du canon et celui de la fusillade qui augmentent d'intensité. Les civils fuient, des bles-sés du 2ème de chasseurs, du 19ème, du 118ème et du 116ème reviennent des lignes. C'est le baptême du feu de la division.

Le 62ème, quitte sa formation de marche, et, par une marche d'approche se dirige sur Maissin. Le terrain boisé est difficile; les unités sont en butte aux feux de l'artillerie allemande, puis de l'infanterie qui occupe solidement Maissin. Le feu de l'infanterie allemande devient extrêmement violent, un ennemi invisible, en position sur les hauteurs, avec un grand nombre de mitrailleuses, ouvre un feu nourri sur toutes les fractions qui essaient d'approcher; les bataillons subissent des pertes sérieuses. Cependant, les 1ère et 3ème cies réussissent à progresser jusqu'à 600 m. du village. Vers 19h., le clairon sonne la charge, les hommes s'élancent à l'assaut, Maissin est pris et 60 prisonniers sont faits.

Un lieutenant du 35ème d'artillerie vient prévenir le cap. Weisbecker, cdt le demi-bat. (2ème et 4ème cies), que les batteries sont compromises. Les hommes mettent baïonnette au canon et chargent l'ennemi, dépas-sent les batteries et s'engagent dans un bois fortement tenu par l'ennemi; accueillies par les tirs d'infanterie et de mitrail-leuse, qui les prend de front et de flanc, elles sont obligées de reculer. Mais leur vigoureuse attaque arrête l'avance de l'enne-mi et permet de dégager les pièces d'artillerie.

Pendant la nuit, les éléments du 62ème (9ème et 10ème cies) qui ont pu pénétrer dans Maissin, couchent dans le village et s'y organisent. Les hommes sont réveillés dans la nuit par une contre-attaque, le village est de nouveau en feu, des coups de feu éclatent de partout. Les hommes prennent la fuite, après avoir repoussé 3 contre-attaques, et d'abandonner les prisonniers. Le régiment se débande.

Dimanche 23, le Japon déclare la guerre à l'Allemagne

Bataille de la trouée de Charmes (au 25 août).

Repli général de la 5ème Armée française

Combats des Britanniques à Mons.

Vers 8h., sur renseignement d'un avion ennemi, l'artillerie allemande déclenche un violent bombardement et l'infanterie allemande attaque fortement les environs de Maissin. Dans la nuit, notre artillerie s'est retirée sur Bouillon; les quelques fractions d'infanterie qui tiennent encore, trop faibles pour résister et sans espoir d'être secourues, sont obligées, vers 10 h., de battre en retraite pour éviter d'être cernées. Elles se retirent sur Bouillon où elles rallient le régiment (qui se regroupe). Les hommes couchent à la belle étoile, il n'ont pas touché de ravitaillement depuis 2 jours.

Dans ces premières journées de bataille un grand nombre d'officiers et de soldats tombèrent glorieusement mais non sans avoir fait subir à l'ennemi des pertes plus lourdes.

Lundi 24, à 5h., la 22ème division bat en retraite sur la Meuse. Le 62ème se dirige par Illy et Givonne /Sedan, où il passe le fleuve, le régiment traverse Sedan sans s'y arrêter. Il cantonne dans un bois, dans des tranchées à Vadelincourt.

 

Mardi 25 : le Japon déclare la guerre à l'Autriche

Le 62ème est alerté à 4h.. Il reçoit l'ordre de mettre en état de défense et d'occuper la position Noyers, Vadelincourt et Fresnois avec mission d'interdire les passages de la Meuse. A 9h., l'artillerie ennemie commence un tir court.

A 10h, notre artillerie répond.

L'ennemi pousse des éléments vers le pont du chemin de fer de Bouillon imparfaitement détruit, mais la violence de notre feu d'infanterie et d'artillerie oblige ses éléments à se replier dans les rues de Sedan. L'artillerie lourde allemande entre en action et contrebat nos batteries de 75 en position vers la Marfée. Le régiment maintient ses positions et bivouaque sur place.

La 10ème cie du 62ème livre une bataille terrible à Chevenges. Une section reçoit l'ordre de se porter dans un petit bois situé à 200 m. en avant des lignes tenues par son unité. La vingtaine d'hommes qui la composent atteint sans difficulté le point fixé et organise sa défense. Les Allemands, qui ne s'étaient pas encore manifestés, déclenchent alors un feu nourri de mitrailleuses, les clouant au sol et les empêchant de riposter. Aux moments d'accalmie, les hommes allongés par terre, relèvent un peu la tête et s'interpelle:" Pierre ! Joseph ! Ca va ? " Au début, tous répondent. Mais plus le temps passe, moins il y a de voix à se faire entendre. La mitraille continue toujours. Bientôt, personne ne répond à Paul Belan. Pour mieux voir autour de lui, il se met à genoux derrière l'arbre qui est supposé le protéger. Il appelle encore. Plus personne ne bouge autour de lui. Pour toute réponse, des rafales de mitrailleuses. C'est alors qu'il ressent comme une brûlure à la lèvre inférieure, en passant son doigt, il constate que le sang coule. Il réalise sa situation, saisit son arme, se relève et court aussi vite qu'il le peut vers les lignes françaises, malgré la mitraille qui se déchaîne de plus belle. A son capitaine qui lui demande: "Que se passe-t-il ? Où sont les autres ? il répond Ils sont tous morts". Jour de chance pour les groisillons, aucun ne fait parti de cette section.

Les hommes se ravitaillent sur les compte des maisons et des animaux abandonnés. La retraite continue, le 26, étape à La Cassine, le 27 à Bulson, le 28 à Vendresse, nouvelle débandade du régiment. Encore la retraite, le 29, à Louvergny, le régiment est attaqué dans la nuit, le 30, Pauvres, le 31, Machaud.

La nécessité imposait à Joffre de regrouper ses forces désunies par une série de combats locaux, tout en présentant aux Allemands un front incurvé, dispositif propice à une manœuvre d'enveloppement qu'il espère tenter. Il signe les instructions qui suivent dans la nuit du 25 août : "Les armées de droite (1ère et 2ème) continueront à barrer la route à la gauche ennemie. Les armées du centre et de gauche (3ème, 4ème et 5ème) et le corps britannique rétrograderont jusqu'à la ligne générale Verdun-Laon-La Fère-haute vallée de la Somme, en liant leurs mouvements et en retardant l'avance de l'ennemi par des contre-attaques courtes et violentes dont le principal élément sera l'artillerie. A la gauche et en arrière de l'armée anglaise, un nouveau groupement de forces destiné à prendre l'offensive en direction Saint Pol-Arras ou Arras-Bapaume, se réunira du 27 août au 2 septembre, soit au Nord d'Amiens, soit au Sud, à l'abri de la Somme".

Ainsi Joffre imagine de répliquer au débordement allemand par un débordement encore plus ample. Les unités chargées de retarder au maximum la poussée allemande ne devront à aucun prix se laisser accrocher. Le groupement de forces prévu à l'aile gauche - la 6ème armée, confiée au général Maunoury - se voit assigner une double mission : endiguer le déferlement des masses gris vert, puis, le moment venu, les contre-attaquer de flanc. Enfin, pour rétablir l'équilibre numérique, Joffre déplace vers l'Ouest le centre de gravité de ses armées. Grâce à une habile utilisation du réseau ferré, ce sont 245.000 hommes, prélevés en Alsace et en Lorraine où les Allemands paraissent arrêtés, qui seront acheminées en Picardie, Ile-de-France et Champagne.

Dès le mercredi 26, Joffre commence le remaniement de ses cadres et constitue la 6e armée qu'il place à gauche des Anglais de French. La 6ème armée qui commence à se rassembler sur la ligne de la Somme donne le signal du redressement.

Formation du gouvernement Viviani, dit "d'Union Sacrée".

C'est à ce moment que Moltke, jugeant la partie gagnée sur le front occidental, s'inquiète des mauvaises nouvelles venues de Prusse orientale et ordonne le transfert de 6 corps d'armée sur le front russe. En fait, 2 corps seulement y seront envoyés, mais leur absence se fera lourdement sentir lors des combats décisifs livrés sur la Marne par la IIème et la IIIème armées.

Ce même jour, Kluck (Ière armée) affronte les Anglais au Cateau. Il ne réussit pas à les envelopper mais leur inflige de si lourdes pertes que le maréchal French décide de se replier rapidement vers le Sud-Est, sur La Fère. Ce recul précipité laisse la voie libre à Kluck et expose dangereusement les 6ème et 5ème armées françaises. Jusqu'au 6 septembre, les Anglais resteront dans une prudente expectative. Décidément tout semblait réussir, aux Allemands dont la IVème armée passe la Meuse vers Sedan le 26 et le 27 août !

De ce jour (au 30), les Allemands (généraux Von Hindenburg et Ludendorff), grâce aux renforts envoyés, remportent une éclatante victoire contre les Russes, au sud de la Prusse Orientale (bataille dite "de Tannenberg"). Mais la 2ème Armée russe (général Samsonov) est encerclée puis anéantie. Les Russes perdent 90.000 prisonniers, dont 13 généraux. Le général Samsonov se suicide le 30.

De bon matin l'ennemi démasque une nombreuse artillerie qui bat tous les plis du terrain où se terre le 62ème. L'artillerie, violemment prise à partie, ne peut répondre. Profitant de ce déluge d'obus, l'infanterie allemande, qui a réussi à passer la Meuse dans la presqu'île d'Ige, lance une action à la gauche du front tenu par le 62ème.

Pendant que, sur le front de Vadelincourt, le bombardement continue, l'infanterie ennemie bouscule les faibles forces qui à s'opposent à sa progression et s'empare de Fresnois. Entre 16 et 17h., la fusillade se fait nettement entendre derrière la posi-tion de Vadelincourt qui doit être abandonnée.

Le 62ème, tourné sur sa gauche, à 19h. reçoit l'ordre de se replier sur Château Rocan au sud-ouest de Chéhery

Les cies de gauche font face à l'attaque et essaient de limiter les progrès de l'ennemi. Le 3ème bat. reçoit du général, cdt la 22ème D.I. l'ordre d'exécuter, en liaison avec le 65ème, une contre-attaque sur Fresnois.

Ce mouvement est arrêté par un feu très violent de l'ennemi, qui tient déjà les lisières nord des bois de Fresnois et de la Marfée. Mais la résistance de ces éléments permet aux autres fractions du régiment, engagées dans les bois de la Marfée, d'en sortir et de se reformer au nord-est de la ferme de St-Quentin. Les hommes se ravitaillent sur les comptes des maisons et des animaux abandonnés.

A 14h., le 62ème est envoyé à l'attaque dans la direction de Chevenges, où quelques fractions parviennent à pénétrer (8ème et 11ème cies), mais le gros ne peut déboucher du bois qu'à la nuit tombante.

A 21h., le régiment occupe Chevenges avec le 2ème bat. et quelques cies des 1er et 3ème bat. Dans la nuit, il reçoit l'ordre d'évacuer ce village et de se porter dans la direction de Chéhery. Les éléments du régiment bivouaquent vers Chéhery et la ferme de Saint-Quentin (2ème bat.).

 

Le jeudi 27, Moltke ordonne à ses commandants d'armée de "marcher sur Paris". "L'essentiel pour les armées allemandes est de marcher sur Paris, de ne pas laisser de répit aux armées françaises, d'empêcher toute nouvelle organisation de forces et d'enlever au pays la plus grande partie de ses moyens de lutte". A cet effet, la lère armée (Kluck) marchant à l'Ouest de l'Oise gardera le flanc droit des armées, la IIème enlèvera Maubeuge, Laon, La Fère et continuera sur Paris, la IIIème axée sur Château-Thierry prêtera main forte à ses voisines, la IVème marchera sur Épernay, la VIème et la VIIème empêcheront l'irruption des Français en Lorraine et en basse Alsace avec de très grosses pertes. Ces prescriptions sont conformes au plan Schlieffen, mais la phrase finale de la directive prévoit - (il est important de le souligner) que des résistances françaises peuvent obliger à redresser la marche du Sud-Ouest en Sud. C'est bien ce qu'il allait se produire, au détriment des envahisseurs.

la 22° D.I. bat en retraite sur Chaumont - St Quentin. Le 62ème se reforme à Malmy où doit être prise une position de repli pour permettre à la D.I. de se reconstituer. A 13h., le 11ème C.A. reprenant l'offensive, le 62eme quitte Malmy et se porte par Chéhery dans la direction de Bulson - Saint--Quentin où la D.I. doit contre-attaquer.

Après quelques coups de fusil tirés, une véritable poursuite commence. Les Allemands laissant de nombreux morts sur le terrain fuient en désordre sur Noyers et Pont-Maugis. Nos éléments les poursuivent énergiquement jusqu'au bois de Noyers, faisant une trentaine de prisonniers. Quelques groupes du 69ème dispersés participent, avec des éléments du 137ème et de la 21ème division, à l'attaque de Chaumont &endash; St Quentin et à la prise d'un drapeau ennemi. Le régi-ment bivouaque sur ses positions.

Vendredi 28, l'Autriche déclare la guerre à la Belgique

La résistance de la Belgique a ralentie l'offensive allemande. Notre frontière franchie, il eût fallu que l'armée allemande pût marcher sur Paris. Chaque pouce de territoire lui a été disputé. ler armées françaises n'ont reculées nulle part qu'aprés de durs combats. La principale colonne de l'armée d'invasion avance. Elle était hier dans la forêt de Compiègne. Elle ne reculera devant aucun sacrifice pour nous faire entendre son canon. Cependant sur ses flancs, nos armées et l'armée anglaise continuent, soit à manoeuvrer, soit à combattre. Malgré l'énorme poussée de plus d'un million d'hommes, l'heure marquée pour la chute de Paris (11 aout) est passée. L'armée française tient. Et, dès lors, c'est l'état-major allemand qui avoue l'échec de son plan. Depuis deux jours les trains succèdent aux trains, emportant de Belgique en Prusse des troupes destinées à disputer aux Russes la route de Berlin.

Au lever du jour, le 62ème se reporte en avant et va s'établir au sud du bois de Chéhery, prés de la route Bulson, cote 299, en soutien du 116ème qui tient le front à la lisière nord du bois de Chéhery.

Vers 10h., un mouvement de retraite se produit parmi les éléments engagés vers la ferme St-Quentin et à l'est (44ème brigade et division de réserve) le régiment s'établit au nord-ouest de Bulson, tenant les couloirs débouchant de Thélonne. Il reste ainsi en position jusqu'à 16h. A ce moment, il reçoit l'ordre de se porter sur la ferme St-Quentin pour appuyer l'offensive de la division de réserve. Le régiment bivouaque à la ferme, couvert dans la direction du nord par le 3ème bat. aux avant-postes.

Aux environs de Bapaume, après une patrouille du 20ème Dragons devant la ligne allemande, le 338ème Régiment d'infanterie ( région de limoges) s'était déployé. Le commandement : " Baïonnette haute ! " avait retenti et les malheureux "pantalons rouges ", offrant une cible de choix aux mitrailleuses allemandes, avaient chargé. Ils furent immédiatement fauchés ...

Selon le rapport officiel, 19 officiers, 1 420 sous-officiers, caporaux et soldats ont été tués. Si l'on tient compte du nombre des blessés, on comprend qu'après son premier combat, le régiment n'existait plus.

Il en fut de même pour un autre régiment de cette division, la 62ème Division d'infanterie, le 263ème Régiment d'infanterie qui perdit 1 299 hommes. Tous ces massacres étaient dus à l'application stricte des ordres du Haut-Commandement militaire.

Le général Ganeval, dans son ordre du jour, en prenant le commandement de la division, n'avait-il pas proclamé : " N'oubliez pas que la baïonnette, l'arme française par excellence, est l'ultime argument ".

Ce fut une véritable hécatombe dès le premier mois de la guerre ; d'août 1914 à décembre, 492 000 de nos soldats sont tombés, c'est-à-dire davantage que pendant la terrible année 1916, l'année de Verdun.

En toute hâte, le général Joffre releva de leur commandement 134 officiers généraux, les envoyant en disponibilité dans la 12ème Région militaire, celle de Limoges d'où l'expression " limoger " restée célèbre.

 

Le samedi 29, la vigoureuse contre-attaque de la 5ème armée (Lanrezac) à Guise brise l'élan de la IIème armée (Bülow). De ce fait, la Ière armée se trouve placée en flèche et Kluck, stratège impétueux et passablement présomptueux, décide le 31 août d'infléchir sa marche vers le Sud-Est, dans l'espoir de déborder les Anglais et les Français de la 5ème armée.

Le 62ème quitte le bivouac pour reprendre les positions de la veille. Il se porte ensuite, par Connage--Omicourt et les bois, sur Vendresse où la 43ème brigade doit s'établir pour couvrir la retraite du C.A. Le 62ème occupe la hauteur à l'ouest de Vendresse, 2ème et 3ème bat. en 1ère ligne, battant les lisières du village et des bois Charlemagne. Le 1er bat. en réserve à Terron les Vendresse.

A 15h., le régiment quitte ses emplacements et se dirige Terron les Vendresse, sur Louvergny où il s'établit en cantonnement bivouac, sous la protection d'avant-postes fournis par le 116ème R.I.

Le 62ème régiment est attaqué dans la nuit, et nouvelle débandade

Le dimanche 30, Joffre donne l'ordre de repli général vers la Seine.

Le 11ème C.A. reprend son mouvement de retraite sur l'Aisne. La 43ème brigade ouvre le mouvement en se portant sur Marquigny, la Saboterie, Tourteron Ecordal. Mais l'ennemi, qui a poussé fortement dans la direction du sud, tient déjà Tourteron. Le régiment oblique alors vers le sud, et se porte par Mametz /Suzanne où il reçoit l'ordre de contre-attaquer sur Tourteron, en liaison avec la 60ème division de réserve. Ce mouvement ne peut s'exécuter en raison du repli de cette division. Le 62ème se porte alors sur Attigny, où il passe l'Aisne, il marche ensuite sur Vaux-Champagne où il bivouaque. Pendant la nuit, il met en état de défense les hauteurs au sud d'Attigny.

Le lundi 31, Compiègne à 80 km de Paris est occupé.

Foch est appelé au commandement de la 9e armée, nouvellement créée. Pendant ce temps, l'avance aisée de la Ire armée allemande, pourtant ponctionnée de quelques divisions pour renforcer le front russe, entraîne son chef à prendre un raccourci par rapport au plan initial.

A 5h., le 62ème reçoit l'ordre de quitter ses positions et de se porter au nord-est de Pauvres où la 43ème brigade, formant arrière-garde doit s'établir sur 2 lignes : le 62ème à droite, le 116ème vers Pauvres.

- 1ère Une ligne de résistance sur la première crête au sud de la route Pauvres-Coulomnes (2ème et 3ème bat. accolés) avec des éléments de surveillance au nord de cette route.

- Une 2ème ligne sur la crête au sud de la précédente (1er bat.). Le régiment conserve les mêmes positions le 1er sept.

 

septembre

Lançant ses troupes à marche forcée, Kluck atteint le mardi 1er Crépy-en-Valois et Villers-Cotterêt, prêt, semble-t-il, à attaquer Paris dont ses avant-gardes ne sont qu'à quelques dizaines de kilomètres. Mais le 5 septembre au matin Kluck reçoit, à La Ferté Milon, un message radio que Moltke lui envoie ainsi qu'à Bülow : "L'intention de la Direction Suprême est de refouler les Français en direction du Sud-Est en les coupant de Paris. La Ière armée suivra la IIème en échelon et assurera en outre la couverture du flanc des armées". Mais au lieu d'arrêter sa marche vers le Sud-Est, il l'accélère. Le sort en est jeté : ses divisions franchissent la Marne à Château-Thierry et à l'Ouest. Dès lors, non seulement il ne protège plus le flanc droit allemand mais il gêne la progression de l'armée Bülow. La faute est grave, mais en avance d'une étape sur Bülow, il lui fallait pour l'attendre s'immobiliser pendant deux jours, ce qui aurait laissé le temps aux Anglais et aux Français de se ressaisir.

Retraite générale des armées françaises et anglaises sur une ligne Bray/seine, Nogent/seine, Arcis /aube Vitry le François, Bar le Duc

C'est le glissement vers le Sud-Est des armées allemandes qui va donner à Joffre l'occasion patiemment attendue d'une contre-offensive victorieuse. Encore fallait-il qu'il connût, avec une certitude suffisante, les mouvements de l'envahisseur. Or, le mercredi 2 l'état-major est encore persuadé que les Allemands marchent sur Paris. Le gouvernement quitte la capitale où le général Gallieni s'apprête à soutenir un siège, comme en 1870 ! Le changement d'orientation des armées allemandes est discerné dès le 31 août par une reconnaissance de cavaliers, confirmé par les missions d'observation d'aviateurs anglais et français de la 6ème armée. Prise de Senlis. Mais il faut attendre le 3 septembre pour que ces renseignements soient pris en considération par l'entourage de Gallieni. Il comprend vite, malgré les doutes qui l'assaillent ("Je n'ose y croire, ce serait trop beau ! "), le parti que l'on pouvait tirer d'une attaque menée depuis le camp retranché contre les colonnes allemandes en marche.Cette manoeuvre inattendue incite alors le gouverneur de Paris, Galliéni, de tenter une manoeuvre hardie.

La 22ème D.I., qui doit se porter sur Moronvillers, laisse en arrière-garde le 116ème chargé de tenir la Suippe; le 62ème, soutenu par un groupe d'artillerie, doit tenir Moronvillers. Les 1er et 3ème bat. occupent les hauteurs à l'est et au nord du village. Le 2ème bat. placé au sud, en réserve, est en même temps soutien d'artillerie. Vers 15h., l'ennemi, après avoir forcé le 116ème à battre en retraite, attaque. La ligne tient parfaitement sous le feu jusqu'à 16h.. À ce moment, l'ennemi bombarde violemment Moronvillers qu'il incendie et occupe. Vers 19h, une contre-attaque, menée par des éléments des 3 bat., reprend le village, mais l'ennemi, qui reçoit sans cesse des renforts, s'en empare à nouveau vers 21h.. Le régiment, qui a reçu alors l'ordre de se replier, gagne Prosne où il arrive à 23h. et il cantonne.

Le jeudi 3, le 11ème C.A. continue sa retraite sur la Vesle. Le 62ème quitte Prosne à 4h. et se porte par Mourmelon-le-Petit, sur les Grandes Loges où il s'est établi à 12h. en position d'attente. À 15h., le 2ème bat. est envoyé vers Ligny s/vesle et Louvercy, en soutien du 118ème qui défend la voie ferrée de Chalons à Reims. Ce bat. s'engage vigoureusement et occupe le talus de la voie ferrée où il se maintient jusqu'à 18h.. À ce moment, le feu d'artillerie redouble pendant qu'un mouvement d'infanterie se produit sur la droite du bat. Ce dernier quitte alors la voie ferrée pour occuper une position plus au sud et, à la nuit, sur l'ordre qui lui donné, rejoint à la Veuve, le 62ème qui bivouaque en ce point.

Dès le vendredi 4, avant d'en référer à Joffre étant donné l'urgence de l'action, Gallieni rassemble toutes les forces disponibles du camp retranché (6.000 soldats), pour agir rapidement, il réquisitionne tous les taxis parisiens afin de transporter les hommes (c'est épisode des "Taxis de la Marne") et ordonne à la 6ème armée (Maunoury) de marcher sur le flanc droit de Kluck entre Senlis et Meaux. Ce renfort inespéré de troupes fraîches pèsera lourd dans la victoire de la Marne. Au même moment, les renseignements lui étant parvenus à son Quartier Général de Bar-sur-Aube, Joffre eut la même idée et comprit qu'il fallait "profiter de l'occasion". Aussi approuvera-t-il entièrement le projet de Gallieni que vint lui exposer un officier de liaison. Joffre dira plus tard, non sans humour : "Je ne sais pas qui a gagné la bataille de la Marne. Mais si elle avait été perdue, ce serait moi le responsable". Joffre décide que l'on se battra sur la Marne. Mais que feront les Anglais dont le concours est indispensable ? Et les troupes harassées par 15 jours de retraite seront-elles en état de reprendre l'offensive ? Enfin quelle date fixer pour le jour J. ? Joffre hésite, envisage le 7, puis, sur l'avis de Franchet d'Esperey (nouveau général commandant la 5ème armée) et après un ultime coup de téléphone de Gallieni, il avance la date au 6 septembre. Aussitôt il rédige et signe les dispositions générales en vue de la bataille prochaine.

Le gouvernement français quitte Paris pour se réfugier à Bordeaux.

Le général Lanrezac est limogé, et remplacé par Franchet d'Esperey (Vème Armée française).

A 4h, le 62ème quitte le bivouac. La 43ème brigade doit, sous la protection du 19ème, traverser la Marne et se porter dans la direction de Chéniers. Le 62ème franchit la Marne à Matougue où il laisse les 2ème et 3ème cies et une section de mitrailleuses pour permettre le passage des derniers éléments du 11ème C.A.. Le reste du régiment est arrêté à St-Pierre aux Oies, où ils reçoivent, à 16h, l'ordre de reprendre le mouvement sur Chéniers. En arrivant à la ferme Notre-Dame, l'ordre est donné de l'organiser défensivement, puis à 18h. celui de reprendre la marche dans la direction de Soudron, que le régiment atteint à 22h. et où il bivouaque.

Dès le samedi 5, la 6ème armée devra faire mouvement sur la rive nord de la Marne en direction de Meaux pour être prête à attaquer le 6 en même temps que l'armée anglaise placée à sa droite. A Gallieni venu s'enquérir le 4 des intentions anglaises, l'état-major de French, siégeant au collège J. Amyot de Melun, avait donné une réponse évasive. Au dernier moment le maréchal French paraissait hésiter. L'abstention des Britanniques aurait compromis les chances de succès du plan français. Aussi Joffre se rend-il, en personne, au Q.G. du maréchal French au château de Vaux-le-Pénil, près de Melun. L'entrevue fut émouvante, mais il fallut toute l'insistance de Joffre pour obtenir l'accord du général en chef anglais. Après quoi, Joffre regagne son nouveau QG à Châtillon-sur-Seine, d'où il dirigera sa bataille.

A St-Pierre, le bivouac est levé et le 62ème se porte, par Vatry, sur Sommessous. A 9h, il reçoit l'ordre de s'installer, en position défensive, au nord de Sommessous pour protéger le repli de la 22ème D.I. dans la direction de Mailly. Les 2ème et 3ème bat. prennent position de chaque côté de la route de Chalons, sur les cotes 196 et 190. Le 1er bat. est en réserve. A 17h., les dispositions sont modifiées. La 43ème brigade doit tenir solidement Sommessous et les passages de la Somme. Le 116ème s'établit dans le village, son 3ème bat. à l'ouest gardant le pont du chemin de fer et la voie ferrée, son 1er bat. tenant les ponts d'Haissimont Vassimont et organisant une nouvelle position en arrière.

La bataille de la Marne s'engage dès le 6 septembre sur toute la ligne de front.

L'ensemble des armées françaises, ainsi que la petite armée anglaise, se préparent à prendre l'offensive le 6 septembre. A cet instant de la bataille, on trouve, d'ouest en est :

* La 6e armée (général Maunoury, ex-commandant de l'armée de Lorraine dissoute par Joffre le 26 août). Elle occupe un front allant de l'Oise à Meaux.

* L'armée britannique de French, jusqu'au sud-ouest de Château-Thierry.

* La 5ème armée (Franchet d'Espérey). Elle occupe le front dans la région de Sezanne.

* La 9ème armée (général Foch), jusqu'à Vitry-le-François.

* La 4ème armée (général de Langle de Cary), jusqu'à Revigny.

* La 3ème armée (général Sarrail, nommé à la place du général Ruffey, le 30 août) se positionne autour de Verdun.

* La 2ème armée (général de Castelnau), toujours devant Nancy.

* La 1ère armée (général Dubail), devant Epinal.

Entre l'Ourcq et la Meuse, toute l'aile gauche franco-britannique prend l'offensive le 6 septembre.

Le 6, Joffre adresse une proclamation aux armées qui deviendra historique : " Au moment où s'engage une bataille dont dépend le salut du Pays, il importe de rappeler à tous que le moment n'est plus de regarder en arrière. Tous les efforts doivent être employés à attaquer et repousser l'ennemi. Toute troupe qui. ne peut plus avancer devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que de reculer. Dans les circonstances actuelles, aucune défaillance ne peut être tolérée. "

L'ordre du général Joffre "Se faire tuer sur place plutôt que de reculer" est lu et commenté dans toutes les unités. Cet ordre produit une impression profonde. Malgré les dures épreuves subies pendant la retraite, chacun sent la nécessité de s'arrêter, de se sacrifier, de ne plus reculer. On se prépare au combat.

Cette gigantesque bataille met aux prises pendant six jours pres de deux millions d'hommes. A let, les IVe et Ve armées allemandes ne parviennent pas à faire sauter le "verrou de Verdun" que Sarrail défend avec acharnement. A l'est, von Kluck talonne par Maunoury bat en retraite sur l'Ourcq. Le 8, les Anglais de French et la cavalerie passent le Petit Morin et s'enfoncent dans la trouée ouverte entre les Ire et IIe armées de von Kluck et von Below. Au centre, 9e armée de Foch tient bon, face aux tentatives de dislocation. A droite, toutes les attaques du Kronprinz sur Verdun sont repoussées et Castelnau, à la faveur de la bataille du Grand Couronne, dégage Nancy. La situation périlleuse de leur aile droite, complètement disloquée et menacée d'être coupée en deux, incite les Allemands à battre en retraite (9-12 septembre). Ils ne sont pas repoussés plus loin que l'Aisne, mais ils se trouvent moralement ébranlés car ils doivent continuer à combattre, non plus pour écraser, mais pour ne pas être écrases, alors que les Français reprennent confiance.

* la 6ème armée sous les ordres du général Maunoury a la tâche d'attaquer de front et de déborder par sa droite le IVème corps de réserve allemand. La droite française (groupe de Lamaze) lance des attaques vigoureuses, dès le point du jour, elle repousse les allemands de Saint-Soupplets et de Monthyon; à 9 heures, elle atteint le front de Chambry-Barcy-Oissery; mais, à l'aile gauche qui doit effectuer le mouvement débordant, le 7ème corps rencontre près d'Étavigny une partie du IIème corps actif allemand qui s'est décroché de l'armée anglaise et qui est arrivé, à marches forcées, au secours du IVème corps.

C'est le début de l'habile manœuvre de von Klück; il s'est aperçu du danger que fait courir à son armée l'attaque de flanc de Maunoury et va profiter de l'état de fatigue de l'armée anglaise pour jeter toutes ses forces sur la 6ème armée, l'arrêter et éviter ainsi un désastre. La bataille pour Paris commence ! En fin de journée, les Français occupent la ligne Chambry - Marcilly - Puisieux - Acy-en-Multien. L'armée anglaise a continué à se redresser et atteint la ligne Crécy-en-Brie -Coulommiers- Choisy-en-Brie.

* le même jour, la 5ème armée (composée du 1er C.A. - 1ère et 2e D.I.-, du 3e C.A. - 5e, 6e et 37e D.I.- du 10e C.A. (du 6 au 8 septembre et à partir du 12/9) avec 19e, 20e et 51e D.I., du 18e C.A. - 35e, 36e et 38e D.I.- et du 4e G.D.R. : 53 et 69e D.R.) sous les ordres du général Franchet d'Esperey conformément aux ordres du généralissime, les troupes, oubliant leur fatigue, reprennent l'offensive dès 6 heures du matin. La lutte est dure et l'avance assez faible, car, sur le front de la 5e armée, les Allemands ont des positions dominantes, et aucun prélèvement n'a encore été fait dans leurs effectifs en faveur d'autres secteurs.

Le 10e Corps partant du nord-est de Sézanne, sa gauche atteint Les Essarts, s'y bat violemment, repousse les allemands et poursuit sa progression au delà de la forêt du Gault ; mais, dans l'après-midi, le 10e corps de réserve allemand, débouchant de Montmirail, l'oblige à se retirer dans la forêt.

La 20ème division française, formant la droite du 10e Corps, marche en liaison avec la 42e division qui constitue la gauche de la 9ème armée et elle participe aux combats pour la possession de La Villeneuve-lès-Charleville. Un combat opiniâtre s'y déroule, les français sont d'abord chassés par une offensive allemande, mais reprennent le village puis sont encore chassés. Finalement une attaque menée à la baïonnette permet aux français de prendre définitivement le village de Villeneuve-lès-Charleville aux allemands. Ceci très tard dans la nuit .

 

Composition du 10e C.A. (1ère armée de l'Ouest) (général Desforges, chef d'état-major : colonel Paulinier).

19ème D.I. (général Bailly)

37e brigade (colonel Pierson)

48e R.I. (de Guingamp), 71e R.I. (de St Brieuc)

38e brigade (lt-colonel Passaga)

41e R.I. (de Rennes), 70e R.I. (de Vitré)

Cavalerie

1 escadron du 13e hussards (de Dinard)

Artillerie

3 goupes de 75 du 7e R.A.C. (de Rennes)

Génie

Compagnie 10/1 du 6e regiment (d'Angers)

20ème D.I.(général Rogerie)

39e brigade (général Ménissier)

25e R.I.(de Cherbourg), 136e R.I. (de St Lo )

40e brigade (colonel de Cadoudal)

2e R.I. (de Granville), 47e R.I. (de St Malo)

Cavalerie

1 escadron du 13e hussards (de Dinan)

Artillerie

3 groupes de 75 du 10e R.A.C. (de Rennes)

Génie

compagnie 10/2 du 6e régiment (d'Angers)

51ème D.R. (général Boutegourd)

101e brigade (général Petit)

233e R.I., 243e R.I., 327e R.I.

102e brigade (général Leleu)

208e R.I., 273e R.I., 310e R.I.

Cavalerie

2 escadrons du 4e cuirassiers (de Tours)

Artillerie

1 groupe 75 du 15e R.A.C.(de Douai), 1 groupe 75 du 27e R.A.C. (de Douai), 1 groupe 75 du 41e R.A.C.

Génie

compagnies 1/13, 1/24 du 3e régiment, compagnie 22/17 du 1er régiment et D.T./8e

Réserve d'infanterie

241e R.I., 270e R.I.

Cavalerie

13e hussards (de Dinan)

Artillerie

4 groupes du 50e R.A.C.

Génie

compagnies 10/3, 10/4, 10/16, 10/21 du 6e régiment (d'Angers) et S.Pont.; D.T./8e

* Toujours le même jour et bien qu'en sensible infériorité numérique, la 9e armée, (composée du 9e C.A. - 17ème D.I., D.M., 52ème et 18ème D.I.-, du 11e C.A. : 21ème, 22ème, 60ème et 18ème D.I. (du 8 au 13/9 inclus)-, du 10e C.A. - 19ème, 20ème et 51e D.I. (du 9 au 11/9) et du 21ème C.A. - 13ème et 43ème D.I. (à partir du 14/9, 42e D.I.) sous l'énergique impulsion du général Foch, ne se borne pas à la défensive passive. Elle essaie de gagner du terrain, mais, après une journée de lutte violente, parvient à grand-peine à conserver ses positions.

 

Composition du 11e C.A. (général Eydoux; chef d'état-major : colonel Weywada).

21ème D.I. (général Radiguet)

41e brigade (colonel de Teyssière)

64e R.I. (d'Ancenis), 65e R.I. (de Nantes)

42e brigade (colonel Lamey, jusqu'au 8/9, puis colonel Bouyssou)

93e R.I. (de la Roche/Yon), 137e R.I. (de Fontenay le Comte)

Cavalerie

1 escadron du 2e chasseurs (de Pontivy)

Artillerie

3 goupes de 75 du 51ème R.A.C.

Génie

Compagnie 11/1 du 6e régiment

22ème D.I. (général Pambet)

43e brigade (général Costebonel)

62e R.I.(de Lorient), 116e R.I. (de Vannes)

44e brigade (général Chaplain)

19e R.I. (de Brest), 118e R.I. (de Quimper)

Cavalerie

1 escadron du 2e chasseurs (de Pontivy)

Artillerie

3 groupes du 35e R.A.C. (de Vannes)

Génie

compagnie 11/2 du 6e régiment (d'Angers)

60ème D.R. (général Joppé)

119e brigade (général Reveilhac)

247e R.I., 248e R.I., 271e R.I.

120e brigade (général Margueron)

202e R.I., 225e R.I., 336e R.I.

Cavalerie

2 escadrons du 24e dragons (de Dinan)

Artillerie

1 groupe 75 du 7e R.A.C. (de Rennes), 1 groupe 75 du 10e R.A.C. (de rennes), 1 groupe 75 du 50e R.A.C.

Génie

compagnies 10/13, 10/19, 10/24 du 6e régiment (d'Angers) et D.T./8e

18ème D.I. (général Lefèvre)

(rattaché au 11eme CA du 8 au 13 sept)

Réserve d'infanterie

293e R.I., 337e R.I

Cavalerie

état-major et 4 escadrons du 2e chasseurs (de Pontivy)

Artillerie

4 groupes du 28e R.A.C. (de Vannes)

Génie

compagnies 11/3, 11/4, 11/16, 11/21 du 6e régiment (d'Angers) et S.Pont.; D.T./8e

Les troupes de Foch ont été durement éprouvées par la retraite. Certaines unités ont subi des pertes sévères; beaucoup d'officiers ont été tués. Un régiment, le 65e R.I., a perdu tous ses officiers supérieurs. Le plus élevé en grade des survivants est un capitaine. Le 118e R. I. n'a plus qu'un commandant. " Quelle pagaille ! quelle purée ! " avait murmuré quelques jours plus tôt le général Dubois, chef du 9e corps, voyant passer ses soldats devant lui. " Le spectacle était effrayant, rangs mélangés... allure traînante... Les hommes hâves, déguenillés, la plupart sans havresac, plusieurs sans fusil, quelques-uns marchant péniblement, appuyés sur des bâtons et semblant sur le point de succomber au sommeil. " Le général avait d'ailleurs ajouté : "Oui, mais ce sont des Français. Deux ou trois jours de repos... peut-être moins, un peu de sommeil, du ravitaillement et il n'y paraîtra plus."

A cette armée harassée, Joffre n'a assigné qu'une tâche raisonnable : tenir, en gardant le contact avec ses voisins. Pour y parvenir, Foch va, inlassablement, exhorter ses hommes à l'offensive. Peuvent-ils progresser réellement ? Foch n'y croit guère mais, en tendant vers l'avant la volonté des soldats, il écarte de leur esprit toute idée de retraite. La " volonté de vaincre ", le " ressort moral ", jamais Foch ne trouvera une meilleure occasion d'en utiliser les ressources et d'appliquer les principes qu'il avait lui-même professés à l'Ecole de Guerre. Il va effectivement s'y employer. A ses généraux, accablés par l'âpreté de la lutte, l'état d'épuisement de leurs hommes, la maigreur des effectifs et qui demandent à rompre un combat qu'ils croient perdu, Foch oppose un refus catégorique et persistant, refus qui s'exprime en phrases brusques, hachées, proférées d'un ton tranchant, ponctuées des gesticulations habituelles : " Attaquez ! Cramponnez-vous au terrain ! Tenez ! Vous n'avez rien d'autre à faire. "

La 42ème division prend l'offensive avant le jour dans la direction générale du nord-ouest, mais le 10e Corps allemand, débouchant de Corfélix et des hauteurs de Saint-Prix, contre-attaque en force et l'oblige à reculer. Le combat reprend, le "brave" Grosseti, "un centaure" dit-on, entraîne sa 42ème division contre Soizy et Villeneuve que défend tout le 10eme corps prussien. Devant un ennemi deux fois supérieur en nombre, les 94ème, 151ème et 162ème régiments d'infanterie; les 8ème, 16ème et 19ème bataillons de chasseurs à pied, appuyés par le 61ème régiment d'artillerie de campagne, font des prodiges. Le combat est extrêmement violent. La Villeneuve, perdue à 8 heures du matin, est reprise à 9 heures, reperdue vers midi et enfin reconquise la nuit à la baïonnette par les français .

Le 9ème Corps après s'être organisé défensivement à la lisière sud des marais de Saint-Gond, doit tenter de déboucher vers Champaubert. La gauche de la division du Maroc reçoit l'ordre de se porter sur Saint-Prix et Baye, et la brigade Blondlat, bien avant le jour, essaye à nouveau d'enlever Congy, déjà attaqué la veille sans succès. Mais le mouvement offensif est bientôt arrêté, et si la brigade Blondlat arrive à dépasser Courjeonnet, elle est ensuite prise sous le feu de l'artillerie adverse et ne progresse plus. A 9 heures du matin, elle est décimée, les Allemands ayant refoulé à sa droite les éléments de la 17e division qui tenaient Toulon-la-Montagne ; peu après, elle est obligée de rétrograder au sud des marais. L'après-midi, la division du Maroc reste sur la défensive et la lutte devient encore plus intense. A la gauche un combat épique s'engage sur la crête appelée "Signal du Poirier". La crête du Poirier est perdue, mais les tirailleurs parviennent à s'accrocher aux pentes sud, au prix d'efforts inouïs. Sur la droite, les français retranchés dans Oyes, Reuves et Broussy-le-Petit résistent à toutes les attaques allemandes .

Dans la matinée, la 17e division et la 52e division de réserve s'établissent à la lisière sud-est des marais, en s'appuyant sur le Mont-Août. Pendant ce temps, le 135e R.I., resté la veille au soir en arrière-garde, livre des combats violents à Toulon-la-Montagne et à Morains-le-Petit, mais est obligé de battre en retraite et, repassant les marais, va se reformer au Mont-Août. Ce recul découvre, comme on l'a vu plus haut, la brigade Blondlat, de la division marocaine, qui lutte au nord des marais. Le 77ème R.I. tente de rétablir la liaison et après avoir organisé une base défensive à Bannes, il traverse les marais, entre en action à Coizard et marche vers Toulon; mais, après avoir héroïquement combattu, il doit se replier sous le feu de l'artillerie.

Le 9e corps ne peut progresser et doit renoncer à se maintenir au nord des marais, mais il parvient, malgré les violentes attaques qu'il subit, à garder presque intacte sa ligne de résistance au sud des marais.

A droite du 11e C. A. s'installera la 60e D.R. Enfin, la 9e division de cavalerie s'efforce d'occuper les solitudes du camp de Mailly. Au delà, plus rien, le vide. Les premiers soldats de l'armée Langle de Cary sont bien plus loin, vers l'est. Foch doit donc porter en avant toutes ses réserves pour étayer sa ligne, et le soir, bien qu'engagé dans un très dur combat contre des forces deux fois supérieurs en nombre, il n'a déjà plus aucune troupe disponible. Il n'a plus rien, mais il a son génie et son imperturbable optimisme .

On pouvait toutefois se demander si l'énergie verbale et le refus de battre en retraite suffiraient à maintenir un front assez fragile, surtout à l'aile droite où le " malheureux 11e corps ", l'unité la plus malmenée de toutes, défend un secteur de 12 kilomètres. Plus loin, la 9e division de cavalerie, dont les chevaux sont constamment fourbus, s'efforce de masquer, par une présence d'ailleurs à peu près inactive, le vide de 12 kilomètres qui s'ouvre entre elle et la 4e armée. Que les Allemands découvrent ce vide, s'y engouffrent et c'est la percée et la dislocation du front français.

* Toujours le même jour, la 4eme armée sous les ordres du général De Langle de Cary, s'efforce d'arrêter la marche des troupes allemandes; sa tâche est lourde car elle a dû prendre ses positions presque au contact des forces qui la poursuivent et seule son aile gauche, constituée par le 17e corps qui a retraité en tête de l'armée, a gardé assez d'aisance pour un retour offensif. Par endroits, elle sera encore obligée de reculer, mais néanmoins, au cours de cette journée, elle parvient à fixer le gros des troupes adverses.

Le 17ème Corps se porte vers le nord. Malgré le feu de l'artillerie adverse établie au nord de la voie ferrée de Sommesous à Vitry, une vive lutte d'infanterie se déroule à l'ouest du château de Beaucamp; le soir, le 17e corps français refoule le 19e saxon et porte ses avant-postes auprès de la ligne de chemin de fer, à l'ouest de Huiron.

Le 12e corps réduit, à quelques bataillons de ligne, perd, après une résistance acharnée, Frignicourt, Courdemanges et Huiron. Mais l'adversaire, trop éprouvé, ne tire pas parti de son avance, et les Français reprennent dans la soirée ces deux derniers villages.

A la gauche du Corps colonial, après une lutte violente sur le canal de Saint-Dizier, les Allemands passent sur la rive sud, attaquent en force, mais ils sont repoussés par les français et ne peuvent entamer la ligne Blaise-Norrois-Matignicourt. Sur la droite, Vauclerc et Ecriennes tombent aux mains des allemands après de durs combats.

Les attaques allemandes sont soutenues par un feu violent d'artillerie dirigé de Heiltz-l'Evêque et Heiltz-le-Maurupt. Au cours de la matinée, le canal est forcé à l'ouest de Le Buisson. Au même moment, les Allemands obligent à se resserrer sur sa gauche le Corps colonial, avec lequel le 2ème Corps est alors menacé de perdre tout contact. Mais le général Gérard, qui commande ce dernier corps, bouche aussitôt la brèche : profitant de ce que la situation est plus favorable du côté de la 4e division qui tient le front Pargny-Sermaize, il envoie à travers bois l'une de ses brigades (la brigade Lejaille) autour de Favresse, pour remplacer les coloniaux.

La lutte s'étend bientôt sur le canal à l'est de Le Buisson; à 15 heures, tous les ponts jusqu'à Étrepy sont tombés. Pargny, après un terrible bombardement, est attaqué par le nord et par l'ouest, mais les français résistent à tous les assauts allemands. Entre Pargny et Sermaize, l'infanterie allemande occupe Alliancelles, mais son attaque s'est brisée devant Remennecourt bien défendue par les français.

* L'ordre général d'opération prévoit, pour cette même journée, l'attaque du flanc gauche allemand par la 3e armée, sous les ordres du général Sarrail, attaque qui doit correspondre à celle exercée sur le flanc droit par l'armée Maunoury vers l'Ourcq. Mais les Allemands prennent les devants avec des forces presque doubles. Ils concentrent leur effort sur le 5e corps, qui est en liaison avec l'armée de Langle de Cary. Ce corps plie sous le choc, mais fait payer chèrement le terrain qu'il est contraint d'abandonner; quant au 6e corps, il parvient à peine à conserver ses positions, malgré l'appui du groupe des divisions de réserve qui cherchent à déborder l'aile gauche allemande.

Les Allemands prennent l'offensive un peu avant 6 heures du matin. Sommeilles et Nettancourt sont perdus. Le feu d'artillerie est si intense sur Noyers que ce village doit être évacué. Dès lors, les Allemands manœuvrent pour accentuer la poussée qui doit briser la liaison entre les armées Sarrail et de Langle de Cary; ils descendent sur Villers-aux-Vents, au nord duquel la bataille fait rage. Dans la matinée, le général Roques, commandant la 10e division (homonyme du général commandant le 12e corps, futur ministre de la guerre), est blessé mortellement. Toute la journée, le 5e corps se défend pied à pied; cependant, tour à tour, Villers-aux-Vents, Brabant-le-Roi, Revigny, Laimont sont abandonnés, après que des pertes importantes ont été subies de part et d'autre. Le soir, la ligne passe par Vassincourt, Louppy-le-Château et Villotte.

Les Allemands devancent l'offensive du 6ème Corps, et le général Verraux doit d'abord résister sur la ligne Sommaisne-Beauzée-Deuxnouds. Vers 10 heures du matin, l'attaque française se lance malgré la supériorité numérique des forces adverses. A la gauche, la 17e brigade, qui a été prêtée par le 5e corps, dépasse Pretz et parvient à l'ouest d'Evres, mais, prise de flanc par les feux allemands, elle est obligée de se replier. Le centre, après avoir fait quelques progrès, se voit contraint d'abandonner Sommaisne pour s'établir entre ce village et l'Aire. Il évacue également Beauzée et Deuxnouds et se retire au nord et à l'ouest de Seraucourt. A droite, la 40e division, partant de Seraucourt, attaque dans la direction de Saint-André. Après avoir combattu sous bois toute la journée, elle regagne à la nuit Seraucourt.

Lorsque la gauche du 6e corps passe à l'offensive, les 75e et 67e divisions de réserve (3ème groupe de division), qui ont quitté leur cantonnement dans la nuit du 5 au 6, attaquent d'Issoncourt et de Souilly dans la direction de Saint-André-Ippécourt. Pendant tout le jour, elles luttent avec acharnement, réussissent à progresser jusque vers Saint-André-Osches, mais sont finalement rejetées sur la ligne Signal d'Heippes-Souilly.

Dès cette journée, la défense de Verdun passe du rôle passif au rôle actif et envoie, sous les ordres du général Heymann, la plus grande partie de la 72e division de réserve, la 108e brigade et les 164e et 165e régiments d'infanterie, donner leur appui à l'extrême droite de la 3e armée. Ces troupes attaquent le 16e Corps allemand dans la direction de Jubécourt, Ville-sur-Cousances-Julvécourt et sont très sérieusement engagées. Le soir, leur diversion terminée, elles se retirent à Rampont et à Les Souhesmes.

Au soir de cette journée du 6 septembre 1914, sur l'extrême droite française, les combats sont plutôt indécis, malgré une très légère reculade des français, surtout tactique, rien de décisif et les français de De Langle et de Sarrail réussissent à tenir tête aux attaques allemandes. Au centre, Foch se crampronne au terrain avec difficultés, il lutte, il est vrai, contre des forces deux fois supérieurs, mais une contre-attaque sur Mondement rétablit les affaires, et Franchet d'Esperey est à ses côtés et peut lui prêter main forte. En Lorraine, à la bataille du Grand Couronné, Castelnau inflige une défaite au corps bavarois. A la gauche, la bataille pour Paris, n'as pas vraiment débuté, les soldats français de Lamaze ont gagné du terrain, mais ils ne sont pas allés plus loin .

Sur toute cette partie du front, la bataille est plutôt indécise, les français tiennent bon, mais la victoire n'est pas encore acquise !

L'offensive allemande pour Paris débutera le lendemain 7 septembre !

La 6ème armée de Maunoury résiste (8 septembre) autour d'Acy aux attaques allemandes, attaques qui avaient pour objectif de percer le front français. Malheureusement pour les prussiens, la bravoure des soldats français change la donne ! L'armée de Maunoury sauve Paris.

Maintenant au tour de Franchet d'Esperey d'entrer en action ! L'avance de la 5ème armée est superbe, grâce à une série de victoires offensives, il a refoulé les allemands sur toute la ligne, s'emparant d'un bon nombre de villages. La manœuvre offensive de la Marne est déjà commencé ! " La façon vigoureuse avec laquelle la 5ème armée de Franchet d'Esperey entra dans la bataille fut décisive !" dit le Maréchal Mangin. "Son rôle, écrit Joffre dans ses mémoires, mérite d'être souligné devant l'Histoire. C'est lui qui a rendu possible la victoire de la Marne."

A 5h., l'artillerie ennemie bombarde violemment La Chapelaine. L'infanterie allemande se lance à l'attaque sur la ligne Lenharrée-Haussimont-Vassimont. Mais elle subit des pertes sévères et l'attaque échoue. L'artillerie ennemie continue son feu violent sur nos lignes.

Depuis le 6 septembre, les français font des prodiges de valeurs, ils repoussent les allemands hors de Montceau, s'y maintiennent malgré les contre-attaques allemandes. Franchet d'Espérey relance de nouvelles attaques contre les deux armées allemandes qu'il combat. Les allemands sont battus sur toute la ligne et chassés d'Esterney !

Au regard d'une carte des opérations, on se rend compte de l'importance des victoires offensives de Franchey d'Espéret. Par cette avance, la 1ere armée de Kluck est menacée d'encerclement !!! A sa gauche, Maunoury, à sa droite l'aile gauche de Franchet d'Espérey, et devant lui le corps expéditionnaire anglais de French !

Il ne reste plus à Kluck, que de s'échapper pour éviter un désastre ! Il ordonne donc la retraite. Les armées allemandes suivent le mouvement rétrograde. La bataille de la Marne devient une victoire française, la France et Paris sont sauvés, les allemands sont battu et n'ont pas pris Paris, ni fait signé la paix à la France. Leurs objectifs ont donc échoué.

 

Mardi 8 (au 15), première bataille de l'Aisne (Chemin des Dames, Ferme de Hurtebise)

A 3h., l'ennemi prononce une attaque générale sur Lenharrée-Haussimont-Vassimont.. Il réussit à s'emparer de Haussimont et de Vassimont. Mais, pris sous le feu nourri les cies qui garnissent la lisière des bois, il subit de lourdes pertes et ne peut progresser. Il renouvelle ses efforts toujours avec le même insuccès, mais vers 10h., ces unités constamment renforcées parviennent à faire céder la gauche de notre ligne. Le 2ème bat. du 62ème et le 1er bat. du 116ème, qui occupent Lenharée, violemment bombardés et attaqués par les forces supérieures, sont obligés de se retirer par la voie ferrée. Pour éviter d'être enveloppés, le colonel ordonne la retraite sur la Maltournée et Vaudefroy, puis sur Semoine qui sera le point extrême de la retraite. Le 62ème, qui s'est rallié sur les positions au sud de ce village, organise celles-ci défensivement pendant la nuit: les 1er et 3ème bat. en 1ère ligne, le 2ème bat. en réserve.

Dans la soirée, des nouvelles réconfortantes arrivent "les allemands sont en retraite sur tout le front".

Mercredi 9, dans la matinée, l'artillerie allemande se montre très active, dans le but de permettre à son infanterie de se replier, elle canonne violemment nos positions. A 18h., le 62ème reçoit l'ordre de reprendre l'offensive et de se porter à Montepreux et la côte 209. A 23h, il atteint les positions indiquées, mais un nouvel ordre le ramène en arrière, et, à 3h., il réoccupe les positions primitives au sud de Semoine.

 

Jeudi 10, offensive française en Argonne

Ordre de repli général des troupes allemandes.

A 6h., la 43ème brigade reçoit l'ordre de reprendre l'offensive dans la direction de Sommesous. Le 62ème se porte en avant à 8h.; le 3ème bat. forme l'avant-garde. Il occupe successivement la côte 206 et la hauteur de l'Arbre; puis, renforcé par le 2ème bat., il se porte sur la côte 209. A 18h., la 43ème brigade reçoit l'ordre d'enlever Sommesous. Le 1er bat. attaque dans le triangle de la voie ferrée et la route de Mailly en liaison avec la gauche du 116ème R.I. Le 3ème bat. en réserve à hauteur de l'Arbre.

Dans la nuit, les Allemands évacuent Sommesous abandonnant leurs morts et blessés. Les environs sont jonchés de nombreux cadavres attestant la violence de la lutte.

 

Vendredi 11, recul général des armées allemandes, entre l'Ourcq et Verdun.

La véritable poursuite commence. Dans la joie de la victoire, les hommes oublient toutes leurs fatigues, toutes leurs privations, les colonnes ennemies sont talonnées à courte distance et, le soir, après une marche de toute la journée, on est déjà loin de Sommesous, on cantonne à Nuisement, le 116ème prend les avant-postes.

Samedi 12, début de plusieurs tentatives de manœuvres enveloppantes successives par l'ouest dite "de la course à la mer"

De bonne heure, la poursuite reprend. Le 62ème, avant-garde de la 43ème brigade, pénètre à 7h. dans Chalons/marne (2ème bat. en tête), où il fait une trentaine de prisonniers. Il s'établit ensuite sur la ligne La Folie - côte 143 pour protéger le débouché de la 22ème D.I. au nord de Chalons et de la Marne. A 13h., la marche en avant est reprise dans la direction du camp de Chalons par St Hilaire au Temple. A 18h., le régiment s'établit aux avant-postes vers la ferme de Cuperly : 2ème bat., à cheval sur la route; 1er bat., au sud-est de la voie ferrée; 3ème bat., en réserve à la ferme de Cuperly.

Ce même jour (par décision du général, commandant la IIème armée), le colonel Costebonnel quitte le commandement du 62ème pour prendre celui de la 43ème brigade; il est remplacé à la tête du 62ème par le lieutenant-colonel Chapard.

Dimanche 13, la poursuite continue dans la direction du nord. La 43ème brigade, en 2ème ligne, marche dans la direction le Suippes.

A 16h., elle reçoit l'ordre de se porter vers St-Souplet, par la ferme Piémont, Jonchery et St-Hilaire-le Grand. Le 116ème est à l'avant-garde.

A 21h., après avoir dépassé la voie romaine, 1.500 m au nord de St-Hilaire-le-Grand, le régiment est brusquement arrêté par une violente fusillade de l'ennemi qui tient, avec de l'infanterie et des mitrailleuses, la lisière des bois des 2 côtés de la route et qui a laissé l'avant-garde s'engager dans la direction de St-Souplet avant d'ouvrir le feu. La brigade est obligée de se replier sur St-Hilaire-le-Grand; elle bivouaque au sud-est de ce lieu, déjà occupée par le 32ème R. I.

Lundi 14, fin de la bataille de la Marne. Le front se stabilise entre l'Oise et l'Argonne. La victoire française n'est pas décisive, faute d'avoir pu être exploitée.

Le général Von Moltke est remplacé par le général Von Falkenhayn à la tête des armées allemandes.

Le 62ème reste en position d'attente entre St-Hilaire et Jonchery d'abord, puis au sud de ce lieu, pendant que notre artillerie prépare, par un bombardement, l'attaque des positions ennemies à l'est de la Suippes. Le régiment bivouaque au sud-est de Jonchery.

 

 

suite - année 1914/2  

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20 novembre 2002

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